L'histoire : déterminisme
ou destin.
Il existe diverses
manières de considérer le rapport que les humains entretiennent avec leur vie
et l'enchainement des faits historiques et leur rôle dans ces derniers
(liberté)
Les croyants et assimilés acceptent le destin comme décret de la
Providence Divine. Dieu est la cause première qui détermine les causes secondes
dans le sens du bien et du meilleur. Pour eux généralement il y a un début ( Au
commencement était...) et une fin : l’Apocalypse.
Bossuet, évêque de Meaux dans son discours sur L’Histoire Universelle, qui montre le rôle
capital joué par Dieu au sein de la vie des hommes. Il éclaire ainsi le destin providentiel et atteste que l’injustice du
sort n’est qu’apparente. Quant aux Jansénistes, le salut dépendait de la
volonté et de la grâce de Dieu. Le mérite humain n’avait pas une grande part
dans l’affaire. L’homme, corrompu par le péché, ne disposait plus des moyens
nécessaires pour gagner seul son salut. Il restait un être déchu tant qu’il
n’était pas touché par la grâce divine. Dieu choisissait ainsi ceux qu’Il
voulait sauver.
Dans cette vision de l'histoire il est fait appel à la transcendance que
l'homme ne peut atteindre Il est le jouet et entre sa naissance et sa mort et
sa vie n'est qu'une "vallée de larmes".
La discussion "philosophique", tourne à la scolastique et à la
théologie.
Pour ce qui est du déterminisme
la chose est plus complexe. Il y a un pas gigantesque entre les
conceptions de Spinoza qui nous livre à un déterminisme absolu, et les
philosophes matérialistes qui vinrent après lui. " Telle
est cette liberté humaine que tous se vantent de posséder et qui consiste en
cela seul que les hommes ont conscience de leurs appétits et ignorent les
causes qui les déterminent."
(Spinoza :Lettre à Schuller). pour lui, ignorants les causes qui nous meuvent
nous ne pouvons pas accéder à la liberté; Etant entendu que ces causes relèvent
de lois universelles, celles de la Nature.
On retombe ici dans une sorte de destin.
Mais vinrent les philosophes post-Hégéliens comme Marx et Engels, ainsi
que les chercheurs qui bouleversèrent les conceptions du monde, comme Darwin.
Tout ne s'avérait aussi mécanique, mécaniste, linéaire. Le hasard et la
nécessité s'entremêlaient donnant à concevoir une histoire mue doublement par
le hasard et la nécessité.
« D’après
la conception matérialiste de l’histoire, le facteur déterminant dans
l’histoire est, en dernière instance, la production et la reproduction de la
vie réelle. Ni Marx, ni moi n’avons jamais affirmé davantage. Si, ensuite, quelqu’un torture cette
proposition pour lui faire dire que le facteur économique est le seul
déterminant, il la transforme en une phrase vide, abstraite, absurde.
La situation économique est la base, mais les divers éléments de la
superstructure – les formes politiques de la lutte de classes et ses résultats,
– les Constitutions établies une fois la bataille gagnée par la classe
victorieuse, etc., – les formes juridiques, et même les reflets de toutes ces
luttes réelles dans le cerveau des participants, théories politiques,
juridiques, philosophiques, conceptions religieuses et leur développement
ultérieur en systèmes dogmatiques, exercent également leur action sur le cours
des luttes historiques et, dans beaucoup de cas, en déterminent de façon
prépondérante la forme. Il y a action et réaction de tous ces facteurs au sein
desquels le mouvement économique finit par se frayer son chemin comme une
nécessité à travers la foule infinie de hasards (c’est-à-dire de choses et
d’événements dont la liaison intime entre eux est si lointaine ou si difficile
à démontrer que nous pouvons la considérer comme inexistante et la négliger).
Sinon, l’application de la théorie à n’importe quelle période historique
serait, ma foi, plus facile que la résolution d’une simple équation du premier
degré.
Nous faisons notre histoire nous-mêmes,
mais, tout d’abord, avec des prémisses et dans des conditions très déterminées.
Entre toutes, ce sont les conditions économiques qui sont finalement
déterminantes. Mais les conditions politiques, etc., voire même la tradition
qui hante les cerveaux des hommes, jouent également un rôle, bien que non
décisif. ...
Il y a donc là d’innombrables forces qui se contrecarrent
mutuellement, un groupe infini de parallélogrammes de forces, d’où ressort une
résultante – l’événement historique – qui peut être regardée elle-même, à son
tour, comme le produit d’une force agissant comme un tout, de façon
inconsciente et aveugle. Car, ce que veut chaque individu est empêché par
chaque autre et ce qui s’en dégage est quelque chose que personne n’a voulu.
C’est ainsi que l’histoire jusqu’à nos jours se déroule à la façon d’un
processus de la nature et est soumise aussi, en substance, aux mêmes lois de
mouvement qu’elle. Mais de ce que les diverses volontés – dont chacune veut ce
à quoi la poussent sa constitution physique et les circonstances extérieures,
économiques en dernière instance (ou ses propres circonstances personnelles ou
les circonstances sociales générales) – n’arrivent pas à ce qu’elles veulent,
mais se fondent en une moyenne générale, en une résultante commune, on n’a pas
le droit de conclure qu’elles sont égales à zéro. Au contraire, chacune
contribue à la résultante et, à ce titre, est incluse en elle.
C’est Marx et
moi-même, partiellement, qui devons porter la responsabilité du fait que,
parfois, les jeunes donnent plus de poids qu’il ne lui est dû au côté
économique. Face à nos adversaires, il nous fallait souligner le principe
essentiel nié par eux, et alors nous ne trouvions pas toujours le temps, le
lieu, ni l’occasion de donner leur place aux autres facteurs qui participent à
l’action réciproque. Mais dès qu’il s’agissait de présenter une tranche
d’histoire, c’est-à-dire de passer à l’application pratique, la chose changeait
et il n’y avait pas d’erreur possible.
Mais, malheureusement, il n’arrive que
trop fréquemment que l’on croie avoir parfaitement compris une nouvelle théorie
et pouvoir la manier sans difficulté, dès qu’on s’en est approprié les
principes essentiels, et cela n’est pas toujours exact. Je ne puis tenir quitte
de ce reproche plus d’un de nos récents “ marxistes ”, et il faut dire aussi
qu’on a fait des choses singulières. »
F. Engels
- Lettre à Joseph Bloch 21-22 septembre 1890
"La liberté n’est pas dans une indépendance
rêvée à l’égard des lois de la nature, mais dans la connaissance de ces lois et
dans la possibilité donnée par là même de les mettre en œuvre méthodiquement
pour des fins déterminées. Cela est vrai aussi bien des lois de la nature
extérieure que de celles qui régissent l’existence physique et psychique de
l’homme lui-même, - deux classes de lois que nous pouvons séparer tout au plus
dans la représentation, mais non dans la réalité.
La
liberté de la volonté ne signifie donc pas autre chose que la faculté de décider en connaissance de cause. Donc, plus le
jugement d’un homme est libre sur une question déterminée, plus grande est la
nécessité qui détermine la teneur de ce jugement ; tandis que
l’incertitude reposant sur l’ignorance, qui choisit en apparence arbitrairement
entre de nombreuses possibilités de décision diverses et contradictoires, ne
manifeste précisément par là que sa non-liberté, sa soumission à l’objet
qu’elle devrait justement se soumettre.
La
liberté consiste par conséquent dans l’empire sur nous-mêmes et sur la nature
extérieure, fondé sur la connaissance des nécessités naturelles ; ainsi,
elle est nécessairement un produit du développement historique".
F. Engels dans L’Anti-Dühring
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