UNE CROYANCE PEUT-ELLE ÊTRE UNE IDÉE ?
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Oui, elle est une idée authentique si elle est le résultat - et non la
source, imaginaire et métaphysique - d’un processus réflexif basé sur des faits
avérés et juste suffisants pour la produire (induction philosophique). Quant à la question de la source (les
causes), il faut prendre en compte la manière (méthode) par laquelle les
déterminations primordiales de la connaissance sont établies. Ainsi
l’évidence intellectuelle de la certitude identifiable à la détermination
matérialiste des causes (Spinoza) s‘oppose à la croyance floue, irréfléchie,
imaginaire, illusoire, métaphysique.
- Sinon, une croyance
n’est pas une idée. Essayons d’argumenter cela.
Si la philosophie comme science inductrice est matérialiste et vise la compréhension du monde tel qu’il est, alors elle a un rapport avec la recherche de la vérité (la connaissance). Par contre le caractère d’illusion de la croyance, lui, pose problème parce qu’il n’est pas aisément repérable. En effet la croyance a l’apparence du vraisemblable, mais sans la justification rationnelle pour la fonder. Elle est un jugement posé d’emblée avant toute connaissance. Elle n’est qu’un pré-jugé, un préjugé. C’est pourquoi la croyance est une menace plus grande que le mensonge et le faux. En effet, ceux-ci au moins ont la conscience de ce qu’ils sont.
Si la philosophie comme science inductrice est matérialiste et vise la compréhension du monde tel qu’il est, alors elle a un rapport avec la recherche de la vérité (la connaissance). Par contre le caractère d’illusion de la croyance, lui, pose problème parce qu’il n’est pas aisément repérable. En effet la croyance a l’apparence du vraisemblable, mais sans la justification rationnelle pour la fonder. Elle est un jugement posé d’emblée avant toute connaissance. Elle n’est qu’un pré-jugé, un préjugé. C’est pourquoi la croyance est une menace plus grande que le mensonge et le faux. En effet, ceux-ci au moins ont la conscience de ce qu’ils sont.
La problématique est alors double, à savoir : 1)
la croyance est-elle inconscience de son objet et 2) le doute philosophique
est-il le remède aux leurres sophistiques de la croyance ?
1.
La croyance est suspecte parce qu’elle implique une coïncidence entre le
sujet et la représentation qu’il se fait. Croire c’est adhérer à son objet,
être en intimité et fusionner avec lui ; en un mot l’aimer. La croyance
suppose ce laisser-aller, la paresse d’un emportement que le sujet ne peut
interroger, évaluer et mesurer. Acquiescer c’est cesser de douter, cesser de
questionner et donc de penser. La croyance de quelque chose c’est cela dès le
premier instant. C’est l’abandon spontané
tout à la fois de la pensée réflexive et de la liberté d’homme et, ainsi, de toute
connaissance.
Or ce que Spinoza démontre pour le dénoncer comme croyance c’est l’illusoire libre arbitre que beaucoup
imaginent comme produit d’une nature humaine qu’ils s’inventent. Alors que
la liberté authentique s’acquiert par la recherche et par la connaissance
effective ainsi obtenue des causes de
la chose envisagée. Notamment visée à cet égard est la croyance des religions
qui imprègnent les hommes, soi-disant à « l’insu de leur plein gré ».
A savoir que l’immédiateté de la croyance fait l’impasse sur la prise de
conscience d’elle-même et donc sur la volonté qui la fait naître. La croyance
une fois acceptée, son auto-justification fait passer sous silence les intérêts du sujet que sa croyance permet
ainsi de satisfaire.
Dès lors le croyant a bien du mal à expliquer les ressorts de
sa croyance. Au contraire de la croyance
le mensonge et le faux, eux, ont le mérite d’être le résultat d’une volonté
consciente et de l’exercice de la liberté d’un choix délibéré issu d’une pensée
réflexive.
En bref la croyance est l’absence de distanciation, c’est la
fusion avec son objet qui neutralise l’émergence de l’esprit critique. La
superstition comme la vénération sont des phénomènes de fascination : le
sujet est absorbé par l’objet de sa conviction. Il met en sommeil la
réflexivité de la pensée qui est une des fonctions principales de la
conscience, celle qui distingue les hommes des animaux. C’est cette pensée que
n’ont pas les choses et les bêtes qui, elles, sont déterminées de nature telles
qu’en elles-mêmes.
2.
Mais la croyance n’est pas qu’un repoussoir de la connaissance. Elle est
bien plus. C’est un acte de compensation et de consolation, l’assurance d’un confort. C’est le plus grand risque
de la condition d’homme : le danger est moins de « se tromper à son
insu » que de trouver le confort dans l’illusion comme contraire
de la reconnaissance du réel. C’est verser dans l’idéologie, le dogme et in
fine le fanatisme. Celui que l’on voit prospérer alentour.
Il est rassurant de n’avoir pas à aller chercher plus loin
que la conviction. La croyance s’accompagne d’une tendance à la fixation.
Dogmatisme et fanatisme consistent en une position rigide de l’esprit qui se
maintient sans se justifier dans la répétition des mêmes affirmations
(« ce que je crois » !) qui sont entérinées par une obstination
« imbécile » parce qu’irraisonnée. C’est une impasse, le refus de
penser et le contraire de la méthode
de Descartes. In fine la fixation des convictions conduit à leur sacralisation qui détermine par réaction
des actes meurtriers, tout en occultant les intérêts des croyants prétendument
à l’insu de leur volonté …
3.
Réunissant les deux problématiques, on voit que les croyances pèsent sur
la recherche de la connaissance des choses du monde, mais aussi et surtout sur
la réalisation de la liberté. Les effets de l’une et de l’autre conduisent aux
meurtres les plus irrémissibles. Quel paradoxe est en effet plus criminel que
celui des croyants soi-disant « bien intentionnés » qui travaillent à
la réalisation de leurs confort et intérêt personnels. La veule accoutumance à
la croyance dispense l’individu de l’effort réflexif qui en ferait un homme
s’il recherchait les racines et causes suffisantes de ses convictions. C’est ce
que Spinoza identifia à la liberté
authentique, celle qui se gagne à chaque instant dans les actes
contrairement à l’illusion d’un libre
arbitre de nature dont beaucoup font la croyance continue d’une existence
vide.
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