mardi 18 octobre 2022

Sujet du Merc. 19 Octobre 2022 : Peut on faire des hypothèses

 

Peut on faire des hypothèses sur le futur ?


 MARTINO : Non seulement on peut, mais on doit faire des hypothèses sur le futur, car c’est encore la meilleure façon de se préparer pour le vivre. Je te signale que le futur commence à l’instant et, si je n’avais pas fait l’hypothèse que nous allions prendre un verre ensemble au café-philo, peut être n’aurai-je pas eu le plaisir de débattre sur cette question avec toi.

 

ARTHURO : Oui mais le futur est contingent, imprévisible. Ce n’est pas seulement l’exemple de notre verre, proposition assez banale somme toute et à si court terme, et sachant que tu me dois ce pot depuis longtemps, qui me convaincra de la simplicité de la question.

 

MARTINO : Ah bon, c’est moi qui invite ? Je ne l’avais pas prévu.

 

ARTHURO : Tu vois bien que si tu émets une hypothèse, tu t’engages dans une action et rien ne permet de dire que celle-ci aura les effets prévus. Surtout s’ils te paraissaient « évidents ».

 

MARTINO : D’accord mais il faut savoir au préalable dans quel cadre métaphysique tu acceptes de placer la question de la prévisibilité de l’avenir ?

 

ARTHURO : Et toi, dans lequel ?

 

MARTINO : En ce qui me concerne je serais plutôt tendance Leibniz. Selon ce philosophe ayant inspiré le fameux Pangloss, il est un principe de raison suffisante selon lequel chaque chose existe nécessairement. En effet Dieu choisit, parmi tous les mondes possibles, le meilleur.

 

ARTHURO : Mais alors se pose le problème de la compatibilité d’un tel principe déterministe avec celui de la liberté humaine. Puisque le futur est tracé par la volonté de Dieu, toute action humaine, toute hypothèse impliquant cette action, ne pourraient qu’aboutir à un avenir finalisé, justifié à l’avance, prédestiné. On voit bien le danger de cette philosophie d’inspiration totalement métaphysique pour ne pas dire téléologique.

 

MARTINO : Pourquoi le danger ?

 

ARTHURO : Parce que, s’il y a une fin écrite à l’avance, cela donne du zèle à ceux qui cherchent à justifier les moyens qu’ils veulent utiliser pour y parvenir. Et surtout à ceux qui prennent le pouvoir de décrire cette fin, au prétexte qu’ils sont censés la connaître mieux que les autres. Tu veux des exemples ?

 

MARTINO : Mais on doit bien faire des hypothèses sur le futur, ne serait-ce que pour ne pas accepter forcément toutes celles qu’on cherche à nous imposer.

 

ARTHURO : C’est en effet un devoir, mais à condition de rectifier la méthode en inversant le raisonnement finaliste.

 

MARTINO : Et comment inverser le raisonnement ?

 

ARTHURO : La métaphysique de Leibniz qui conduit donc au finalisme (Le meilleur des mondes possibles) est basée sur une sorte de déterminisme à l’envers, un rétro déterminisme en quelque sorte, où l’effet précède la cause. Puisque Dieu a choisi notre futur, et si nous affirmons notre croyance en cette vérité transcendantale, toutes nos actions et hypothèses d’avenir s’inscrivent alors irrévocablement dans cette perspective. Dans ce cas de figure, l’hypothèse n’est qu’un effet, non une cause. Au contraire si nous croyons plutôt à un déterminisme scientifique positif et causal, nous pouvons effectuer une réflexion sur l’analyse des causes qui engendrent les phénomènes de la nature et du monde sans même chercher à savoir si celui-ci a une justification ou une signification qui préexisteraient à l’action humaine. C’est donc par ses libres choix et par la responsabilité de ses actes que chacun d’entre nous devrait décider du sens qu’il entend donner à sa vie pour contribuer à la marche du monde qui l’entoure.

 

MARTINO : C’est bien le point de vue de Sartre et de l’existentialisme athée que tu avances là.

 

ARTHURO : Peut être, mais cette position est le seul moyen de répondre au titre même de notre café-philo de ce jour (Peut-on faire des hypothèses sur le futur ?). Car ce n’est pas  « Doit-on … », mais « Peut-on … ». Alors je dois bien jouer Sartre contre Leibniz si je veux avoir la possibilité de répondre «  Oui, on peut …» et exprimer le pouvoir de ma liberté de penser, plutôt que «  Oui, on peut toujours essayer… », et n’exprimer que mon pouvoir de résignation.

 

MARTINO : Mais alors si la réponse est « Oui on peut… », çà écarte la possibilité de débattre sur le « Non on ne peut pas… ».

 

ARTHURO : A mon avis, et si l’on se place du point de vue sartrien, la question initiale peut être bonifiée et s’interpréter ainsi : « Peut on faire de bonnes hypothèses sur le futur ? ». Et à ce moment là la problématique tourne alors autour de la plus ou moins bonne pertinence de toute méthodologie utilisée lors de l’émission d’hypothèses.

 

MARTINO : Il est certain que si l’on écarte les considérations métaphysiques (sauf à considérer que la science est elle-même une métaphysique mais alors aucune philosophie positive ne serait possible), on peut essayer d’avoir une discussion critique sur le caractère plus ou moins rationnel de la valeur d’une hypothèse.

 

ARTHURO : Et rendre hommage à des gens comme Claude Bernard par exemple.

 

MARTINO : Bien sûr, mais que faire des « prévisionnistes » qui émettent toute une foultitude d’hypothèses sur le futur sans aucun recours à la science, ou alors en l’utilisant malhonnêtement ou comme science « infuse » ?

 

ARTHURO : Je te laisse te dépatouiller, sans moi, avec tous ces camelots de la connerie humaine, à commencer par ceux dont le nom commence par la lettre « a » : aéromanciens, alectromanciens, aleuromanciens, alphitomanciens, anthroposcopiens, arithmanciens,

anthroposcopiens, astrodianosticiens, astrognosiens, astrologues, astromanciens, axinomanciens…et tant d’autres.

 

MARTINO : Et c’est comment, selon toi, une bonne hypothèse sur le futur ?

 

ARTHURO : Une bonne hypothèse est une hypothèse modeste et raisonnable qui n’utilise que l’extrapolation des lois causales dans le respect du cadre de leur domaine de validité et qui est contrôlée en permanence, régulée en quelque sorte, par l’expérience du réel. Une hypothèse est en quelque sorte une idée préconçue, mais pas une idée fixe, qui guide l’investigation. Car il s’agit de « faire » une hypothèse, c'est-à-dire construire une proposition qui a le maximum de probabilité d’aboutir sur une réalité effective. Pas un charabia dont les conséquences ne sont même pas assumées par celui qui l’a prononcé.

 

MARTINO : Vu sous cet angle c’est certain qu’il est plus facile d’émettre des hypothèses finalistes, comme les prévisions catastrophistes dont on fait actuellement état pour nous plonger dans une psychose de peur.

 

ARTHURO : En effet. Et c’est pourquoi la plupart des hypothèses qu’on nous assène sur l’avenir de la planète sont aussi ridicules les unes que les autres, mais malheureusement elles ont une certaine audience tellement la bêtise humaine est infinie.

 

MARTINO : Et pourquoi ces hypothèses sont-elles ridicules, elles sont pourtant cautionnées par des « scientifiques » ?

 

ARTHURO : Parce qu’elles sont émises par des idéologues qui s’habillent en « scientifiques » et qui, pour mieux brouter le gazon qu’on leur laisse en récompense, se placent en réalité au service des grands maîtres du monde, sans ressentir le moindre besoin d’y ajouter un souci d’éthique. L’alliance du MEDEF et des Ecolos lors du dernier « Grenelle » de l’environnement en est un exemple qui ne semble même plus suspect. Mais tu me diras que «  suce  pet » ou « lèche cul » c’est du kif kif.

 

MARTINO : Je pensais que pourtant, le film de Al Gore…

 

ARTHURO : Un imposteur selon Allègre.

 

MARTINO : Et son Prix Nobel ?

 

ARTHURO : Sartre a refusé le sien.  

 

MARTINO : Et le CO2 ?

 

ARTHURO : Bon on arrête, je prends un Perrier. Avec beaucoup de bulles.

 

 

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