dimanche 8 décembre 2019

Sujet du Merc. 11/12/2019 : Faut-il-une méthode pour connaître la vérité ?


Faut-il-une méthode pour connaître la vérité ?

Des philosophes présocratiques à Hegel au 19ème siècle, la philosophie est essentiellement une recherche de vérité, elle doit établir les bases de la connaissance sur l’homme, le monde.
La connaissance absolue est possible pour certains philosophes : Platon, Descartes, Spinoza, Leibniz…
Elle ne peut être que relative pour d’autres : Kant, Locke, Hume…

Ce relativisme va s’accentuer à partir du 19ème siècle, la philosophie va privilégier le sens avant la vérité : Nietzche, Kierkegaard…
Cette tendance va se généraliser au 20ème siècle. Selon Sartres, l’existence précède l’essence. Avant de pouvoir prétendre à connaître la nature absolue de l’homme, il faut considérer sa situation existentielle.

Désormais la recherche de la vérité pour la vérité n’est plus l’objectif premier pour les philosophes.

Pour autant faut-il aujourd’hui abandonner cette recherche certes extrêmement ambitieuse au profit la réflexion « existentialiste »?

Non, car s’interroger l’essence du monde et de l’homme une tendance naturelle chez tout humain.
D’ailleurs Kant, lui-même, dans sa mise en garde contre toute démarche métaphysique (cf Prolégomènes à toute métaphysique future) mesure la dimension de ce besoin fondamental.

Mais s ila recherche philosophique peut ou doit satisfaire ce besoin légitime, il est important qu’elle accorde une place aux problématiques qui lui sont connexes et peuvent même remettre en cause le statut même de la recherche de la vérité.

Voici quelques exemples de problématiques :

Peut-on trouver la vérité ?
De nombreux philosophes pensent qu’il est impossible de la trouver.
Selon Protagoras, l’être n’existe pas. Du moins s’il existe, il est inconnaissable. C’est l’homme qui définit arbitrairement ce qu’est la réalité et la philosophie n’est donc pas une recherche de la vérité mais un art de la rhétorique, une maîtrise de l’illusion, une science des apparences.

Pourquoi rechercher la vérité ?
Les cyniques trouvent superflue toute spéculation sur la nature du monde et des choses. La philosophie doit s’occuper uniquement de la morale.
Pour Nietzsche, toute entreprise de savoir doit au préalable s’interroger sur son « pourquoi ?»afin de ne pas déboucher sur une illusion et qui plus est une mauvaise pouvant appauvrir les forces vitales de l’humanité. Il entend par là surtout le christianisme, le platonisme ou la métaphysique en général. La question du sens, selon lui, passe avant celle de la vérité et toute entreprise scientifique doit être désintéressée et débarrassée de ressentiment.

De quelle vérité parle ton ?
Pour les philosophes « chercheurs » de vérité, cette dernière se situe au-delà du monde des sens, au-delà du monde empirique dans le monde des idées platonicien par exemple. Ce genre de philosophie est une métaphysique au sens étymologique c'est-à-dire une méta(= au-delà de la),physis(= la nature). Mais l’au-delà des apparences et de l’expérience peut aussi nous amener à situer la vérité dans les choses en elles-mêmes. C’est l’ontologie(discours sur l’être) sorte d’ « intra-physique ».

Exemple : la beauté. Socrate demande à un habitant d’Athènes « qu’est-ce que le Beau ? ». Celui-ci lui répond d’abord « c’est une belle jeune fille ». Mais suite aux questions incessantes de Socrate, il finit par répondre « c’est une belle marmite ». Selon Socrate l’origine de la beauté des choses est dans un concept : le Beau, et cette idée a plus de réalité que la beauté des choses.

Autre exemple : un cube. Je ne vois jamais que les 3 faces d’un cube. Si je m’arrête aux impressions sensibles, je ne peux déduire qu’il s’agit d’un cube or mon esprit sait qu’il y a 6 faces. On peut penser que c’est l’expérience d’avoir vu de nombreux cubes au long mon existence qui m’amènent à conclure qu’il y a 6 faces mais on peut aussi conclure que c’est mon esprit doué d’une intuition métaphysique qui devine les 6 faces et forme ainsi le concept de cube.

Dernier exemple : l’homme. Descartes dans le Discours de la Méthode s’interroge sur qu’est-ce qu’un homme. Il essaie d’y répondre : un homme est un corps et une âme. Mais cela le renvoie à d’autres questions : qu’est-ce qu’un corps ?qu’est-ce qu’une âme ?. Les réponses sont : un corps est ensemble de jambes, bras, tête. Mais cela renvoie aux questions : qu’est-ce qu’une jambe, un bras, une tête ? Et ainsi de suite…L’esprit pratique se satisfait de ses réponses mais pas l’esprit philosophique de Descartes qui ne saisit pas l’essence absolue de l’homme.

Ces exemples nous montrent qu’on ne peut trouver la vérité des choses qui nous entourent dans leur apparence mais que l’être des choses nous est masqué. Cela correspond à l’étymologie grecque de la vérité : l’a-letheia (=non voilement).

Toute recherche de la vérité pour de nombreux philosophes doit donc passer par la métaphysique ou l’ontologie.

Il y a aussi la vérité au sens contemporain qui est d’ordre scientifique, positiviste…

Toutes ces questions peuvent remettre en cause la recherche philosophique de la vérité. Mais l’on peut y formuler les objections suivantes :

Peut-on trouver la vérité ?
Se prononcer définitivement sur cette question revient à établir que la non-existence de la vérité est une vérité. N’est-ce pas absurde ? Toute philosophie du« refus de la vérité »n’est-elle pas un relativisme (Kant, Nietzsche, sophistes) ?

Pourquoi chercher la vérité ?
N’y a-t-il pas encore absurdité ? Car n’est-ce pas la découverte de la vérité qui peut définir le statut de sa recherche ?
Le sens de la recherche de la vérité n’est-il pas défini par la vérité elle-même ?

De quelle vérité parle ton ?
N’est-ce pas absurde d’avoir une idée préalable de la vérité avant de l’avoir trouvée?

Une fois ses questions posées, on peut prendre le parti que la vérité existe et qu’elle peut être l’objet d’une recherche. On se lance dans un voyage immodérément ambitieux dont le problème est de savoir s’il est possible de le faire avec ou sans méthode.

Faut-il-une méthode pour connaître la vérité ?

Voici à nouveaux quelques questions pouvant être abordées lors du débat :

Qu’est-ce qu’une méthode ?
Y-a-t-il une ou plusieurs méthodes ?
Voici des exemples de méthodes : la dialectique socratique, le doute méthodique de Descartes, les critères de la raison pure ou pratique chez Kant, la méthode scientifique...

Sans méthode, la recherche est-elle hasardeuse ?
Se fait-elle par l’imagination, par l’intuition, par la rationalité?

Y-a-t-il une ou plusieurs vérités ?

Place au débat

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