lundi 25 mars 2019

Sujet du mercredi 27/03/2019 : Qu’est-ce que la justice sociale ?


Qu’est-ce que la justice sociale       

Dans « Tristes tropiques », l’anthropologue Claude Lévi-Strauss donne un exemple d’institution judiciaire dans une société primitive. Il ne voit pas  des  sauvages  qui se vengent brutalement contre un criminel, il nous montre au contraire une police qui juge et exécute la peine de façon à rendre possible la réintégration du coupable dans la société. La peine y est conçue et pratiquée comme une offense envers le criminel qu’il faut réparer.

 Il est facile de comprendre que le concept de justice fait partie dès le départ de de l’élaboration de la société. L’observation de Lévi-Strauss dans sa distinction avec la vengeance nous permet de voir que la justice est une abstraction élaborée par les hommes dans une fin qui concerne le collectif.

La vision traditionnelle de la justice proposée par la puissance publique nous demande de juger un homme en fonction de ses actes. Et c’est le non-respect des lois qui fixe le cadre arbitraire qui sera sanctionné. Si ces lois, qui ont été votées, sont injustes ou inappropriées, c’est donc une erreur de raisonnement du débat politique qui est le responsable  du problème. L’exemple le plus grotesque est la loi le chapelier en 1791 qui va interdire pendant 90 ans, toutes les corporations, les syndicats et le droit de grève.

Or le concept de justice sociale repose sur une vision sociologique de la société en désignant un déterminisme social. Mais cette réflexion devrait tenir compte de la condition humaine de départ de l’homme dans la nature dans une précarité effroyable. Ainsi la plus grande injustice serait la nature. Et La contradiction consiste à condamner précisément ce qui nous a permis de nous extraire de notre vulnérabilité par rapport à la nature, au nom de la justice sociale
.
Philosophiquement  il n’est pas possible de reprocher à un système d’être injuste. Comme on ne peut pas reprocher à la géométrie ou au jardinage d’être injuste.  Un jugement de valeur de justice ne peut être reproché qu’à des comportements humains ou à des lois qui ne serait pas appropriés pour précisément guider ou condamner  les comportements des hommes.
Un exemple de confusion des ordres moraux fixés par le pouvoir ou par la perception de la morale ressentie par les individus nous est donné dans la littérature classique. Je pense au livre « les misérables » de Victor Hugo.

L’intrigue principale est très connue, nous avons le héros Jean Valjean qui doit exécuter une peine de cinq ans de prison parce qu’il a volé un pain.  D’emblée le lecteur est confronté à une histoire particulièrement injuste. Cette injustice est très facile à identifier puisque c’est bien l’arbitraire de la loi et du juge qui a dirigé le procès, qui sont bien responsable d’une peine disproportionné par rapport à la faute. Jean Valjean va tenter de s’évader de prison, et reprit par la justice il va de ce fait, être condamné à une peine beaucoup plus lourde.
La raison devrait nous guider vers une interprétation simple, l’injustice provient dans ce cas uniquement de l’arbitraire du pouvoir.

Mais la volonté de l’auteur est  que le lecteur s’identifie totalement au héros Jean Valjean qui est foncièrement bon.

Après Victor Hugo triche  avec le personnage de Cosette. Cette petite fille de 10 ans doit vendre ses cheveux, puis ses dents pour ce faire de l‘argent et donc survivre dans ce monde impitoyable. Car là on nous montre une condition humaine terrifiante en mélangeant une causalité arbitraire subie par Jean Valjean d’une part, et un échec du système économique dans le cas de Cosette d’autre part. Hugo mélange les ordres moraux, entre déterminisme social et arbitraire du pouvoir. Cet amalgame participe à la confusion et nous éloigne de la raison.

Puis dans le déroulement du récit nous avons le personnage du policier particulièrement rigide avec le respect de la loi, qui vient tout au long du roman nous rappeler que la puissance publique dans le respect de l’ordre ne fait aucune nuance, et est surtout incapable de mesurer une faute et une sanction dans l’intérêt général.
Mais coup de théâtre jean Valjean va sauver la vie de Javert le policier. Celui-ci lui en est reconnaissant et va renoncer à poursuivre Jean Valjean, car il est obligé de revoir son jugement moral sur celui-ci. Incapable de résoudre son conflit intérieur entre son éthique personnel et son sens du devoir, il va le vivre comme un cas de conscience insurmontable et choisir de se suicider.

Mais dans la réalité  cela ne se passe pas comme çà.
Oui dans la vrai vie, le policier rentre au commissariat et quand il croise ça hiérarchie, il dira :
Javert, Ah chef, vous savez le fugitif que je poursuivais depuis des années, qui avait volé un pain, et bien j’ai perdu sa trace. Donc je passe à l’affaire suivante.
Le chef, Ah très bien, l’administration ne vous paye pas poursuivre une enquête pendant des années, qui ne mène nulle part.

Et plus tard, Javert peut même  raconter, son histoire dans sa totalité à ses petits enfants en toute bonne conscience, il aura même droit à leur admiration.


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