lundi 10 décembre 2018

Sujet du Merc. 12/12/2018 : DROITE - GAUCHE, MYTHE OU RÉALITÉ ?


                                 DROITE - GAUCHE, MYTHE OU RÉALITÉ ?

Est-ce que la politique doit forcément se réduire à un affrontement idéologique aussi manichéen ? Est-ce que cela a un sens ? Est-ce que cela enrichit le débat de théories ou au contraire transforme toute réflexion politique en argument simpliste stérile ?
Cette différenciation droite-gauche remonte à la révolution française, lorsqu’on a  créé l’assemblée constituante. Ceux qui étaient favorables au roi, avaient pris l’habitude de se placer à droite alors que les opposants s’installaient à  gauche de l’hémicycle. Mais il en ressort une fracture qui persiste même après la monarchie et que l’on retrouve pratiquement dans le monde entier.

Pourtant on s’aperçoit que des personnages ou des partis une fois au pouvoir, ne vont pas respecter leurs promesses ou leurs convictions.
Sans chercher de définitions parfaites je vais quand même essayer de les différencier.
  • La gauche veut transformer la société par la réforme ou la révolution, elle est donc constructiviste et elle se revendique dorénavant l’unique instrument du progrès de la société.
  • La droite est conservatrice : elle veut conserver ce qui fonctionne pour profiter des améliorations spontanées du respect de la loi, des institutions et du système économique.
Mais voilà, les contres exemples sont effectivement très importants, de décisions et de politique qui à priori sont prises à l’inverse ou l’opposé des valeurs que leurs partis défendaient, ou que l’on a voulu les réduire, voire les stigmatiser.
Abraham Lincoln, premier président républicain va interdire l’esclavage.
Bismarck va imposer une sécurité sociale et un système de retraite.
Simone Veil introduira la première légalisation sur l’avortement.
L’empereur  Meiji au Japon en 1867 va transformer son pays en abolissant les privilèges des seigneurs en faveur des paysans.
Charles De Gaulle, va abandonner toutes ses colonies en Afrique et en Asie, et introduire beaucoup de lois sociales (Smic, allocations) et participera à la construction de logements sociaux.
Bill Clinton, pendant ses 8 années de présidences va réduire tous les ans les dépenses publiques, pour arriver les deux dernières années à un excèdent budgétaire.
Gerhard Schröder de centre gauche, imposera de grandes réformes avec les lois Arts I, II, III, IV qui comprennent la création des mini jobs, le durcissement de l’indemnisation du chômage, et une politique d’austérité.
Lionel Jospin, pendant qu’il sera premier ministre privatisera plus d’entreprises qu’aucun gouvernement de droite.
François Mitterrand en 1983, change de politique en tentant de revenir à une rigueur budgétaire qualifié par beaucoup comme un virage libéral à 180°.   
Alexis Tsipras en Grèce en 2015 remporte les élections et lance un référendum pour sortir des politiques de rigueur imposé par la Troïka mais finira bien par une politique d’austérité.
Donc est ce que tous ces exemples seraient le fait seulement de trahison idéologique, d’erreurs grossières de jugements ou de manque de courage.

Éliminons ces trois hypothèses pour nous intéresser d’abord à la distinction des trahisons de droites et de gauches. Car si on cherche les raisons de ces dysfonctionnements on ne peut pas trouver les mêmes causalités. 
En effet, est ce que cela a un sens de reprocher à Abraham Lincoln de vouloir abolir l’esclavage, de même que je ne connais personne de raisonnable qui reproche à Simone Veil d’avoir autorisé l’avortement, à part quelques intégristes religieux sectaires ? Il serait vraiment bizarre de critiquer Bismarck de vouloir imposer un système de retraite et d’assurance sociale en plein XIX° siècle même si le personnage impérialiste est plutôt contestable.

Donc pour la droite qui pourrait prendre des décisions en contradiction avec le discours dominant de son courant politique, nous ne pouvons pas l’attribuer à une décision irresponsable mais bien au contraire à une recherche sincère d’amélioration de l’intérêt générale. Que leur  libre arbitre leur permet d’être en contradiction avec l’idéologie où on les a enfermés, est donc tout à leur honneur.

On ne peut pas exclure un dernier argument de faiblesse pour la droite, qui pour acheter une paix social ou se laisser convaincre par une logique marxiste ou encore dans une confusion proche de l’incompétence, peut très bien faire une politique de gauche. (Cela pourrait concerner l’ensemble de la protection sociale ou le poids des prélèvements obligatoires qui ont été votés par  des gouvernements de droite en France).

Passons aux dysfonctionnements de la gauche qui sont relativement  plus graves à mon sens et peuvent pour le coup être qualifiés de véritable trahison à son idéologie.  Pour la simple raison qu’ils peuvent être guidés, comme pour la droite, par la volonté d’améliorer le système économique. Car où cela devient très gênant, c’est que ces hommes politiques quand ils étaient dans l’opposition pouvaient avoir prétendu exactement le contraire de manière obsessionnelle. 

On retrouve toutes les caractéristiques des défauts de l’idéalisme qui consiste à inventer un idéal pour condamner le réel. Et c’est confrontés à l’exercice du pouvoir qu’ils s’aperçoivent que cela ne fonctionne pas. On peut le constater par l’expérimentation des solutions adoptées (gouvernement Mitterrand /Maurois 1981-1983 croissance économique à 2,5 % et le chômage qui poursuit sa  progression) ou dès la prise de pouvoir par anticipation (Election de Tsipras en Grèce où la sortie de l’euro ou de l’Europe n’était pas envisageable raisonnablement).

Mais le plus intéressant dans cette analyse, c’est bien la lente évolution et prise de conscience globale de la société que l’on peut à la fois constater, et considérer comme un acquis de la raison sur l’archaïsme des pouvoirs. L’impérialisme, le colonialisme, l’esclavage,  le féodalisme sont bien des valeurs qui appartiennent au passé, ainsi que la liberté syndicale, le respect du droit de propriété, sont bien jugés comme des progrès. Une conclusion assez positive de tous ces rappels historiques factuels est qu’il existe des choix qui peuvent être guidés par la raison et la sagesse par-delà toute idéologie.

Mais au contraire de cette conclusion il existe bien sûr une interprétation de tous ces contres exemples, pour prétendre que droite et gauche se cofonderaient totalement, dans l’exercice du pouvoir pour entretenir le capitalisme et empêcher, dans une immense conspiration, l’avènement du collectivisme.   


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