Mais pourquoi Pandore a-t-elle refermée la boite ?
Selon le mythe exposé par Hésiode (VIIIème sicle av
JC) dans « Les travaux et les jours » et « la théogonie » Zeus, pour se venger du mauvais tour que lui a
joué Prométhée (Prométhée a dérobé le
feu à Zeus pour le livrer aux hommes), « commande à
l’illustre Héphaïstos de tremper d’eau un peu de terre sans tarder, d’y mettre
la voix et les forces d’un être humain et d’en former, à l’image des déesses
immortelles, un beau corps aimable de vierge (…) Aphrodite, d’or sur son front
répandra la grâce, le douloureux désir, les soucis qui brisent les membres,
tandis qu’un esprit impudent, un cœur artificieux seront, sur l’ordre de Zeus,
mis en elle par Hermès. …. Puis, héraut des dieux, il met en elle la parole et à
cette femme il donne le nom de Pandore (en
grec : don de tous les dieux),
parce que ce sont tous les habitants de l’Olympe qui, avec ce présent, font
présent du malheur aux hommes qui mangent le pain.»
Que va-t-il se passer par la suite ? Prométhée (en grec : celui qui
voit loin, qui anticipe) a un frère Epiméthée
(en grec : celui qui « pense après »). Les dieux donnent Pandore comme épouse à Epiméthée (avec
comme dot une jarre qu’il lui est interdit d’ouvrir) et ce contre l‘avis de
Prométhée qui l’avait mis en garde de ne jamais accepter un cadeau venant de
Zeus.
Pandore, un jour, par curiosité, souleva le couvercle
de la jarre qu'elle devait garder fermée et en laissa échapper tous les maux
qui se répandirent sur la Terre : la Vieillesse, la Maladie, la Guerre, la
Famine, la Misère, la Folie, le Vice, la Tromperie, la Passion, l'Orgueil.
Seule l'Espérance demeura au fond du récipient que
Pandore avait rapidement refermé sur l'ordre de Zeus.
Mais c’est là que l’affaire se
complique et que nous rentrons dans le vif du sujet. Le mot grec qui a été
traduit par « espérance » est ELPIS. Mais Elpis, avant de signifier
espoir désigne l’attente.
En quoi les dieux auraient-ils punis les hommes en ne
leur permettant pas que le mal « Elpis », l’attente, ne se répande
pas parmi les hommes. Si Pandore a refermé la jarre au « bon moment »
n’a telle au fond pas rendu un grand service aux mortels ?
Au premier abord, Elpis semble être un remède pour
apaiser tous les maux dispersés dans la vie des hommes, car il symboliserait
une chance de s’en sortir. Mais finalement, nous pouvons considérer cet espoir
plutôt comme quelque chose de néfaste car il ne serait qu’un leurre
supplémentaire.
Il donnerait aux hommes l’illusion d’une échappatoire
possible, alors que leur destin est irrévocable. D’ailleurs, cela est souligné
par la volonté de Zeus et la citation « Son piège ainsi creusé, aux bords
abrupts et sans issue. ». En agissant ainsi, le geste de Pandore semble la
rendre responsable d’une nouvelle souffrance, mais finalement il s’agit d’un
geste créateur, car il va obliger l’homme à faire face à son destin
implacable en toute lucidité et en toute conscience, sans la facilité d’une
échappatoire possible qui serait l’espérance.
La grandeur humaine serait sa capacité à affronter cette destinée. Par son geste, Pandore nous a évité une vie univoque : « sinon sans efforts, tu travaillerais un jour, pour récolter de quoi vivre toute une année sans rien faire ». Il s’agirait d’un monde de facilité où la notion de progrès n’interviendrait pas puisque tout ne serait que bonheur, beauté et harmonie.
La grandeur humaine serait sa capacité à affronter cette destinée. Par son geste, Pandore nous a évité une vie univoque : « sinon sans efforts, tu travaillerais un jour, pour récolter de quoi vivre toute une année sans rien faire ». Il s’agirait d’un monde de facilité où la notion de progrès n’interviendrait pas puisque tout ne serait que bonheur, beauté et harmonie.
En amenant le mal, elle donne au monde sa consistance,
sa dualité, car de même que la lumière ne peut exister sans l’ombre, le bien ne
peut exister sans le mal. L’homme a
désormais le choix et à travers cela, il pourra faire la conquête de sa
liberté.
- On est à l’opposé du mythe biblique qui va jeter pour des millénaires l’opprobre sur la femme d’une part et sur l’espoir d’un monde meilleur …. Dans l’au-delà. Dans le mythe grec il n’est question que de l’ici-bas !
En effet, rappelons que selon ce récit, Eve aurait mis
fin à la vie paradisiaque de par sa curiosité qui l’entraîne à cueillir et à
manger la pomme défendue du Jardin d’Eden. Nous voyons ici que la curiosité est
présentée sous un angle négatif, puisqu’elle est assimilée à une
impulsion plus forte que la raison et sans soucis des conséquences, alors que
nous pouvons aussi voir la curiosité sous un jour positif, si on la considère
comme une soif de connaissance. Ici, la connaissance est liée au mal.
En effet, en désobéissant à la loi divine, par curiosité et par orgueil, la race humaine s’éloigne des dieux et met fin à sa vie paradisiaque.
En effet, en désobéissant à la loi divine, par curiosité et par orgueil, la race humaine s’éloigne des dieux et met fin à sa vie paradisiaque.
Le point de
vue de Jean-Pierre Vernant
« ….. Dans
l’histoire grecque de Pandora, tellement sophistiquée d’une certaine façon, il
n’y a aucune culpabilité humaine, aucune. Pandora n’est pas fautive. Elle a été
fabriquée. Elle a été fabriquée et ensuite elle exécute à la lettre tout ce que
Zeus lui ordonne de faire. On lui dit, tu vas chez Épiméthée, elle va chez
Épiméthée. Tu emmènes ta jarre, elle emmène la jarre. Tu ouvres et tu refermes.
Il n’y a pas de culpabilité du tout. Les hommes ne sont pas coupables de ce qui
leur arrivent. Par conséquent leur sagesse consistera à savoir qu’ils ont une
place. Il ne faut ni essayer de se faire chien comme les cyniques, de se faire
bête, ni essayer de se faire Dieu comme d’autres philosophes, peut-être
Pythagore et d’autres. Il faut rester ce qu’on est entre les êtres et les
Dieux, des hommes. Les hommes ont en quelque sorte assisté passivement à ce qui
débattu entre deux Dieux, Prométhée et Zeus, a eu comme résultat de fixer le
destin. Ils constatent le destin, le vivent, essayent de le déchiffrer, d’en
comprendre le sens mais ils n’ont aucun sentiment de culpabilité. Parce qu’en
effet ils ne sont absolument pas coupables, en rien. Voilà ! » J.P.
Vernant - 14 Mai 2007 Lycée de Sèvres
Sources :
Arte histoire
Guus HOUTZAGER, L’univers de la mythologie grecque, trad. Jean-Louis HOUDEBINE, éditions Gründ, Paris, 2004
Jean RUDHARDT, Les dieux, le féminin, le pouvoir, Labor et Fides, Genève, 2000
Arte histoire
Guus HOUTZAGER, L’univers de la mythologie grecque, trad. Jean-Louis HOUDEBINE, éditions Gründ, Paris, 2004
Jean RUDHARDT, Les dieux, le féminin, le pouvoir, Labor et Fides, Genève, 2000
SUJET A
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Mercredi 03
Mai 2017
Doit-on
transformer les désirs en droit ?
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