« Le pire ennemi du peuple, c'est son gouvernement » St Just
Si sa jeunesse et sa fougue ne l’avait pas
entraîné dans de sordides exécutions politiques, Louis Antoine de Saint-Just
aurait pu être considéré comme un père fondateur de l’éducation Nationale… dans
la lignée de Louis-Joseph Charlier. Ses idées sur l’apprentissage n’étaient pas
celles que Jules Ferry imposa au peuple dans un souci de normalité et
d’uniformité.
Saint-Just était soucieux d’un regard
démocratique, même (surtout) de l’éducateur vis-à-vis de l’enfant.
Mais la société se veut hiérarchisée, pour le
bien du peuple, à ce qu’en disent les tyrans.
Saint-Just, fut guillotiné à 26 ans pour avoir
surtout pensé avec Gracchus Babeuf qu’il était de bon ton d’utiliser l’argent
de l’État afin de nourrir le peuple qui avait faim…
Mort à 26 ans, et cependant déjà de sa courte
vie, beaucoup de réflexions philosophiques seraient à étudier… comme cette
citation étonnante : « Le bonheur est une idée neuve en
Europe », même si trop peu de ses œuvres écrites subsistent.
Sur l’échafaud, il aurait dit aussi
« Peuple, ton pire ennemi, ce sont tes dirigeants ! ».
Oui, selon ses propos, « nul ne peut
régner innocemment » !
Saint-Just s’intéressait à la philosophie
grecque et fut aussi fortement influencé par Montesquieu et Rousseau. Sa soif
d’égalité était intimement liée à la démocratie, non à l’illusion que la
Révolution Française pouvait en donner, toujours soucieuse d’une oligarchie.
La France est-elle une démocratie ?
1. Dans une démocratie le peuple est
souverain et gouverne dans l’intérêt général.
2. La constitution de la cinquième
République transfère le pouvoir du peuple à des représentants.
3. L’intérêt général n’est pas défendu par
les représentants.
4. La constitution ne prévoit pour le
peuple aucun moyen légal de contester l’action de ses représentants
5. On doit donc logiquement renoncer au
mot “démocratie” pour décrire le régime français.
Saint-Just a échoué dans sa quête, mais
« au moins, on aura fait quelque chose », dit-il en désignant Les droits de l'homme et du citoyen, peu
avant de mourir.
Pour Saint-Just, « la révolution est
glacée, tous les principes sont affaiblis, il ne reste que des bonnets rouges
portés par l'intrigue. L’exercice de la terreur a blasé le crime comme les
liqueurs fortes blasent le palais ».
« La tragédie, aujourd'hui, c'est la
politique... » et ne voulant être d’aucun parti, pour éviter la désunion qui
sépare le peuple en lui faisant croire en des idéologies différentes, qui se
rejoignent finalement pour mieux l’asservir, il s’est voulu au dessus du
système : « Je ne suis d'aucune faction, je les combattrai toutes ».
Peut-être est-ce là la faiblesse de
Saint-Just ?
Il est entré dans le combat, au lieu de
poursuivre une quête éducative !
La guerre n’apporte jamais la paix… et
« combattre est toujours une défaite » nous rappelle un maître du
Karaté.
Saint-Just aurait été davantage productif en
continuant à inciter le peuple à apprendre par lui même.
La liberté était cependant sa raison d’être,
avec ses contradictions, lorsqu’on lui attribut ces propos : « pas de
liberté aux ennemis de la liberté » mais on retrouve son souci d’équité,
de respect et de considération, même pour la gente féminine, regard évolutif,
qu’il ne verra pas en œuvre de son vivant : « Chez les peuples
vraiment libres les femmes sont libres et adorées ».
Le gouvernement, pour Saint-Just, c’est le
berger qui garde le troupeau, qui le protège certainement des loups… mais qui
tôt ou tard, le mènera à la mort !
Nous sommes tous les prisonniers d’un système
fort complexe que Georg W. Friedrich HEGEL a tenté d’expliquer dans La Phénoménologie de l'Esprit, avec la dialectique du Maître et de l'Esclave.
Un peu moins de cent ans après la mort de
Saint-Just, le Léopard du Panthéon placardait sur les murs de Paris ces propos
lapidaires :
« Peuple
de France, ne vote pas pour un gouvernement » !
Le Léopard du Panthéon, groupe de penseurs
anarchistes éveillés semble-t-il, dès les années 1860, qui tentait de donner au
peuple l’énergie, la volonté et l’audace de vivre libre… Après une suite de
rois, de révolutions, de coups d’État, de présidents et d’empereurs… n’est-il pas
temps ?
Le XIXème siècle est le siècle de tous les
massacres, où le peuple s’inscrit vraiment dans la douloureuse vision des «
Misérables » de Victor HUGO, même si Adolph THIERS, celui dont Georges
CLEMENCEAU dira, « THIERS, le type même du bourgeois cruel et borné qui
s’enfonce sans broncher dans le sang », revisitera l’histoire de France avec
des certitudes d’une époque de progrès et d’unification autour de la patrie,
qui sont toujours les grandes vérités enseignées !
Malgré tant de lois scélérates, en placardant
comme savait le faire Jonathan SWIFT des incitations à se réveiller, le Léopard
du Panthéon ne mentait pas lorsqu’il disait :
« Ne votez pas, car
voter c’est se soumettre,
c’est désigner soi-même
son maître ;
c’est dire : je suis
une bête incapable de me conduire »…
Octave Mirbeau est dans la même idée avec
« La grève des électeurs » :
« Il a voté hier, il votera demain, il
votera toujours. Les moutons vont à l'abattoir. Ils ne se disent rien, eux, et
ils n'espèrent rien. Mais du moins ils ne votent pas pour le boucher qui les
tuera, et pour le bourgeois qui les mangera. Plus bête que les bêtes, plus
moutonnier que les moutons, l'électeur nomme son boucher et choisit son
bourgeois. Il a fait des Révolutions pour conquérir ce droit ».
Peut-être que le peuple aime son pire ennemi,
tant qu’il lui donne du pain et des jeux ?
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