QUELLE EST L’UTILITÉ DES RICHES ?
Envisager ce sujet ne
nécessite-t-il pas de l’aborder à partir des faits historiques avérés et
seulement pertinents, dont le sens émerge peu à peu des principes explicatifs
qui s’en dégagent ? Tout d’abord, on est riche mais de quoi ?
Ensuite, en quoi cela est-il utile en bien ou en mal, et pour qui ? Une
double problématique est ainsi posée, se déclinant de multiples façons.
1. On peut être riche de diverses manières : d’esprit, de talents (tiens,
c’est aussi une mesure monétaire) ; de sensibilité, de cœur, de
compréhension, d’intelligence, de ressources, d’aptitude de rebond et à
évoluer. Ensuite, ne désigne-t-on pas certains de « riches et
puissants » ? Mais quand donc richesse, puissance et pouvoir
devinrent-ils une seule et même chose ; l’apanage exclusif de quelques-uns
qui se concurrencent entre eux et deviennent au fil du temps toujours moins
nombreux à en profiter ?
Les
chasseurs-cueilleurs-pêcheurs, tous nomades, subvenaient simplement à leurs
besoins sans appropriation individuelle ni accumulation de biens ou de
richesses. Le partage prévalait. Ensuite, une sédentarisation progressive a
permis l’une et l’autre. L’appropriation de terres et la propriété privée des
fruits du travail ont engendré des stocks d’excédents qu’il fallut protéger
d’« indus spoliateurs » par la force de gens d’armes. Agents de
sureté des biens et des personnes, ces guerriers eurent tôt fait d’abuser d’un
tel pouvoir de dernier ressort. Au titre d’une contrepartie amplement abusive,
ils s’arrogèrent une part toujours plus grande des richesses produites.
Le travestissement de
la force brute (sur la vie et la mort de tous) en acquiescement à une
soumission mentale ou psychique (de reconnaissance et de dette pour services
ultimes rendus) devint l’apanage le plus sûr des «riches et puissants», qu’ils
puisent dans les autres strates sociales. Les croyances fantasques de la
religion et les convictions idéologiques instillées par la politique l’ont
continument réalisé jusqu’à aujourd’hui. Ce ne sont pourtant pas des entités
abstraites, telles que la religion et l’idéologie, qui l’ont produit. Non, ce
sont concrètement des hommes bien réels, faits de chair et de sang mais souvent
avançant dissimulés, qui les inventèrent et qui conçurent les instruments et
les mécanismes de leur prééminence, dans le but d’assurer le développement
pérenne de leurs intérêts particuliers. Pouvoir et richesse se renforcent l’un
l’autre, réciproquement.
2. Quand à « l’utilité des riches et puissants », elle est évidente en leur
faveur. Néanmoins, sachons reconnaître qu’elle se décline en avantages et en
inconvénients, tant pour leur caste que pour les autres classes sociales. Le
fait d’être riche a certes permis de disposer de temps et de moyens, notamment
pour penser à pérenniser et à accroître ses privilèges. Tout en préservant ses
arrières par un partage minimaliste avec les pauvres, souvent au niveau tout
juste suffisant d’une brève survie, aux strictes fins de maintenir la
« paix sociale ».
Toute une dialectique
positive se met alors en branle. L’une et l’autre parties entament un processus
illimité de changements évolutifs et de découvertes apportant tant gains que
déboires aux uns comme aux autres, en une répartition puissamment inégalitaire.
Une sorte de succession de « meilleur des mondes possible » dont
l’égrènement des moments contemporains assure progrès et récessions. Les
sciences et les techniques, les arts, la politique, l’économie et mille autres
activités n’améliorent-elles pas in fine
le sort de tous ? Peut-on le nier ?
Ou alors, au contraire,
préfèrera-t-on se centrer sur l’effet des écarts devenus ainsi abyssaux ?
Ecarts entre, d’une part, les toujours plus immensément pourvus, en lien avec
ceux qui par leur industrie ou leur consommation assurent tant cette
accumulation infinie vers les plus riches que leur propre bien-être personnel,
pourtant en comparaison tout relatif. Et, d’autre part, les six personnes sur
dix laissées pour compte du marché mondial de la détresse et vouées à une
existence de misère aussi brève que son utilité est faible.
Pour s’en convaincre,
veut-on consulter les graphiques factuels synthétisés par UBS (Union des
banques suisses) de la répartition des patrimoines dans le monde ? Ainsi
que ceux relatifs à la répartition de la richesse en France, pays qui
s’enorgueillit d’égalité, de liberté et de solidarité exemplaires. La
dissimulation idéologique est là hyperbolique. Ou alors préfère-t-on simplement
savoir qu’allouer aux carences alimentaires solides et liquides, pendant les
deux décennies à venir, une fraction des dépenses militaires (ou même de
marketing) mondiales permettrait pour toujours d’épargner chaque année la vie
d’un milliard d’enfants et d’adultes ? Pardon du peu : une personne
sur sept chaque année.
Sait-on qu’au même
moment la nation la plus riche du monde réunit moins de cinq personnes sur
cent. Mais qu’elle dévore néanmoins plus de la moitié des richesses dévolues
aux armées et qu’elle s’impose en outre au monde entier par la richesse et la
puissance qu’elle en extrait, tout en se targuant de partout y défendre la
liberté par voie de guerres à répétition. La logique du maillage coordonné de
ces faits ne passe-t-elle pas pourtant généralement inaperçue ?
Comment une telle
énormité est-elle possible ? C’est bien simple. A partir de la
disponibilité universelle de la relation de tels faits avérés, pertinents et
juste suffisants pour la compréhension de « l’utilité des riches »,
nous restons pourtant fermement rétifs à en tirer les enseignements pratiques.
Alors même que nous pouvons parfaitement dégager
les principes explicatifs de cette « utilité », aux fins tant de
rétablir notre équilibre mental que d’en
tirer collectivement et en toute logique un plan d’action pertinent.
Notons bien
également - et c’est là l’essentiel premier pas
(philosophique) pour chacun d’entre nous dans cette affaire - que
cette démarche de coordination de tous les faits pertinents pour en induire l’ordre sous-jacent du monde n’a
strictement rien à voir avec une approche de tout sujet ou question étudiés
consistant, à l’instar des étourneaux, à rapidement avancer des opinions
personnelles, tirées du chapeau et toujours fantasques ou simplement partielles
et aussi peu fondées les unes que les autres sur l’ensemble des faits
pertinents relatifs, par exemple, à « l’utilité des riches ».
Inscrivez vous à la mailing list du café philosophique de Montpellier :
cafe-philo <@> cafes-philo.com ( enlever les crochets !)
Formulaire direct :
http://www.cafes-philo.com/contact.html
Formulaire direct :
http://www.cafes-philo.com/contact.html
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
1 - Tout commentaire anonyme (sans mail valide) sera refusé.
2 - Avant éventuelle publication votre message devra être validé par un modérateur.