dimanche 1 février 2015

Sujet du Merc. 04/02/2015 : QUELLE EST L’UTILITÉ DES RICHES ?



QUELLE  EST  L’UTILITÉ  DES  RICHES ?

Envisager ce sujet ne nécessite-t-il pas de l’aborder à partir des faits historiques avérés et seulement pertinents, dont le sens émerge peu à peu des principes explicatifs qui s’en dégagent ? Tout d’abord, on est riche mais de quoi ? Ensuite, en quoi cela est-il utile en bien ou en mal, et pour qui ? Une double problématique est ainsi posée, se déclinant de multiples façons.

1.   On peut être riche de diverses manières : d’esprit, de talents (tiens, c’est aussi une mesure monétaire) ; de sensibilité, de cœur, de compréhension, d’intelligence, de ressources, d’aptitude de rebond et à évoluer. Ensuite, ne désigne-t-on pas certains de « riches et puissants » ? Mais quand donc richesse, puissance et pouvoir devinrent-ils une seule et même chose ; l’apanage exclusif de quelques-uns qui se concurrencent entre eux et deviennent au fil du temps toujours moins nombreux à en profiter ?
Les chasseurs-cueilleurs-pêcheurs, tous nomades, subvenaient simplement à leurs besoins sans appropriation individuelle ni accumulation de biens ou de richesses. Le partage prévalait. Ensuite, une sédentarisation progressive a permis l’une et l’autre. L’appropriation de terres et la propriété privée des fruits du travail ont engendré des stocks d’excédents qu’il fallut protéger d’« indus spoliateurs » par la force de gens d’armes. Agents de sureté des biens et des personnes, ces guerriers eurent tôt fait d’abuser d’un tel pouvoir de dernier ressort. Au titre d’une contrepartie amplement abusive, ils s’arrogèrent une part toujours plus grande des richesses produites.
Le travestissement de la force brute (sur la vie et la mort de tous) en acquiescement à une soumission mentale ou psychique (de reconnaissance et de dette pour services ultimes rendus) devint l’apanage le plus sûr des «riches et puissants», qu’ils puisent dans les autres strates sociales. Les croyances fantasques de la religion et les convictions idéologiques instillées par la politique l’ont continument réalisé jusqu’à aujourd’hui. Ce ne sont pourtant pas des entités abstraites, telles que la religion et l’idéologie, qui l’ont produit. Non, ce sont concrètement des hommes bien réels, faits de chair et de sang mais souvent avançant dissimulés, qui les inventèrent et qui conçurent les instruments et les mécanismes de leur prééminence, dans le but d’assurer le développement pérenne de leurs intérêts particuliers. Pouvoir et richesse se renforcent l’un l’autre, réciproquement.

2.   Quand à « l’utilité des riches et puissants », elle est évidente en leur faveur. Néanmoins, sachons reconnaître qu’elle se décline en avantages et en inconvénients, tant pour leur caste que pour les autres classes sociales. Le fait d’être riche a certes permis de disposer de temps et de moyens, notamment pour penser à pérenniser et à accroître ses privilèges. Tout en préservant ses arrières par un partage minimaliste avec les pauvres, souvent au niveau tout juste suffisant d’une brève survie, aux strictes fins de maintenir la « paix sociale ».
Toute une dialectique positive se met alors en branle. L’une et l’autre parties entament un processus illimité de changements évolutifs et de découvertes apportant tant gains que déboires aux uns comme aux autres, en une répartition puissamment inégalitaire. Une sorte de succession de « meilleur des mondes possible » dont l’égrènement des moments contemporains assure progrès et récessions. Les sciences et les techniques, les arts, la politique, l’économie et mille autres activités n’améliorent-elles pas in fine le sort de tous ? Peut-on le nier ?

Ou alors, au contraire, préfèrera-t-on se centrer sur l’effet des écarts devenus ainsi abyssaux ? Ecarts entre, d’une part, les toujours plus immensément pourvus, en lien avec ceux qui par leur industrie ou leur consommation assurent tant cette accumulation infinie vers les plus riches que leur propre bien-être personnel, pourtant en comparaison tout relatif. Et, d’autre part, les six personnes sur dix laissées pour compte du marché mondial de la détresse et vouées à une existence de misère aussi brève que son utilité est faible.

Pour s’en convaincre, veut-on consulter les graphiques factuels synthétisés par UBS (Union des banques suisses) de la répartition des patrimoines dans le monde ? Ainsi que ceux relatifs à la répartition de la richesse en France, pays qui s’enorgueillit d’égalité, de liberté et de solidarité exemplaires. La dissimulation idéologique est là hyperbolique. Ou alors préfère-t-on simplement savoir qu’allouer aux carences alimentaires solides et liquides, pendant les deux décennies à venir, une fraction des dépenses militaires (ou même de marketing) mondiales permettrait pour toujours d’épargner chaque année la vie d’un milliard d’enfants et d’adultes ? Pardon du peu : une personne sur sept chaque année.

Sait-on qu’au même moment la nation la plus riche du monde réunit moins de cinq personnes sur cent. Mais qu’elle dévore néanmoins plus de la moitié des richesses dévolues aux armées et qu’elle s’impose en outre au monde entier par la richesse et la puissance qu’elle en extrait, tout en se targuant de partout y défendre la liberté par voie de guerres à répétition. La logique du maillage coordonné de ces faits ne passe-t-elle pas pourtant généralement inaperçue ?

Comment une telle énormité est-elle possible ? C’est bien simple. A partir de la disponibilité universelle de la relation de tels faits avérés, pertinents et juste suffisants pour la compréhension de « l’utilité des riches », nous restons pourtant fermement rétifs à en tirer les enseignements pratiques. Alors même que nous pouvons parfaitement dégager les principes explicatifs de cette « utilité », aux fins tant de rétablir notre équilibre mental  que d’en tirer collectivement et en toute logique un plan d’action pertinent.

Notons bien également  -  et c’est là l’essentiel premier pas (philosophique) pour chacun d’entre nous dans cette affaire  -  que cette démarche de coordination de tous les faits pertinents pour en induire l’ordre sous-jacent du monde n’a strictement rien à voir avec une approche de tout sujet ou question étudiés consistant, à l’instar des étourneaux, à rapidement avancer des opinions personnelles, tirées du chapeau et toujours fantasques ou simplement partielles et aussi peu fondées les unes que les autres sur l’ensemble des faits pertinents relatifs, par exemple, à « l’utilité des riches ».


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