« N’écoutez jamais votre cœur » Sade
« N’écoutez jamais votre
cœur, mon enfant, c’est le guide le plus faux que nous ayons reçu de la
nature. » in Philosopie dans le boudoir – A.D de Sade
Sade (1740-1814), noble et franc-maçon, passera 27 années en prison. Ses œuvres
ne seront publiées ouvertement par un éditeur qu’en 1957.
Il connait les auteurs des
Lumières de son temps et il partage leur vision du monde. Un monde dans lequel
dieu est une chimère au service du pouvoir, un monde dans lequel le citoyen,
puis l’individu vont balayer le sujet féodal.
L’homme est désormais libre. Mais
sa liberté a-t-elle des bornes ?
Pour Sade l’homme est de nature. Et
la nature n’éprouve ni sentiment ni morale. C’est le règne de la nécessité.
Pour Sade si l’homme est de nature, c’est
l’homme « fort ». La position sociale (le noble, le bourgeois)
s’explique par la force. L’homme sadien n’est pas
l’homme kantien : pas de morale sacrificielle, pas d’intérêt général, mais un
calcul froid sur ce que peuvent lui apporter les autres ou les situations : “Il
ne faut jamais calculer les choses que par la relation qu’elles ont avec notre
intérêt“. On retrouve ici Hobbes et Adam Smith.
Sade défend aussi l’idée d’une absence d’identité ou
d’universalité entre les hommes. Chacun, nous dit-il, est unique et porté par
sa propre nature, on ne peut donc pas leur demander d’agir de la même manière.
En découle un relativisme moral, fondée sur une conception différenciée de
l’homme, qui rappelle celle de Sartre sur la question de la
nature humaine : “Je vous demande si elle
est bien juste la loi qui ordonne à celui qui n’a rien de respecter celui qui a
tout : ce qui va pour l’un ne va pas à l’autre”
Pour résumer Sade nous propose une définition
nouvelle de la « nature humaine ». Elle est désormais poussée à son
paroxysme. Mélange détonant entre l’ouverture des Lumières et le cadre rigide de
la structure sociale féodale.
Pour Sade tout provient de la Nature. Et dans sa citation, qui sert de sujet ce
soir, il nous dit que le cœur (passions, sentiments, émotions…) « est le guide le plus faux que nous ayons reçu …de la
nature ». Cette nature qu’il déifie aurait elle donc
failli ? Il y aurait donc une imperfection de la nature (à la différence
des dieux) et ce serait de croire qu’il est possible de comprendre le monde à
partir de ce « cœur » ? Pour le coup nous pourrions dire que chez
Sade il y a une ruse de …la nature (pour paraphraser Hegel).
L’œuvre de Sade est complexe, foisonnante. Les
biens pensants d’aujourd’hui du style M. Onfray, ont tôt fait de diaboliser
« Sade le fasciste ». Mais L’injonction sadienne : « n’écoutez jamais votre cœur » n’est
elle pas destinée à rendre les hommes lucides ? Sade ne nous dit il pas
aussi : « A quelque
point qu'en frémissent les hommes, la philosophie doit tout dire. ».
Tout dire ; mais combien de philosophes ou d’écrivains, de créateurs,
ont-ils eu le courage, la volonté de « tout dire » ? Peu, et
souvent ils l’ont payé cher !
Une piste aussi, peut être, pour rentrer dans la pensée de
Sade « Je ne m'adresse qu'à
des gens capables de m'entendre, et ceux-là me liront sans danger. ».
La philosophie, les choses nouvelles, doivent être vues avec des yeux neufs,
que la clarté n’éblouit point. La philosophie est un apprentissage et un
savoir. Pas une émotion. Loin des passions.
Bien sûr cela a des conséquences sur celui qui émet des
propos nouveaux, scandaleux, dérangeants, « Ce n'est point ma façon de penser qui a fait mon malheur, c'est celle
des autres. » répond un Sade qui assume.
Libres à vous, aussi libres que Sade – je l’espère -, de
vous prononcer sans détour, ce soir, sur cette phrase sortie de Sade l’éducateur
de la « philosophie dans le Boudoir
– Français encore un effort pour être républicains ».
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