samedi 2 février 2019

Sujet du Merc. 06/02/2019 : Le ludique et le jeunisme : 2 dogmes modernes


Le ludique et le jeunisme : 2 dogmes modernes

Ce sujet semble un peu décalé, au regard des évènements que vit notre pays actuellement, et dans lesquels; comme dirait notre Président "le Tragique s'est enfin invité dans l'histoire européenne". 
 
Sans remonter à des siècles de références, depuis toujours la jeunesse et la fête ont été soit glorifiées, soit diabolisées. La fête, par un de ses aspects, le Carnaval ,paisible, a pu aussi quelquefois "secouer" l'ordre social, et sombrer dans le bain de sang  .Pour exemple, le Carnaval de Romans en 1580,verra les notables et les artisans passer de l'épée de bois, aux armes réelles, et se massacrer après 15 jours de fêtes danses, et théâtre. On relèvera des dizaines de cadavres. Au II me siècle avant l'ère chrétienne, une Bacchanale va dégénérer à un point tel, que le Sénat romain va procéder à des arrestations.

La fête est toujours un instant porteur de nombreuses interprétations .Elle peut inquiéter l'ordre établi, car elle le tourne en dérision, et appelle à l'irrespect; quelquefois première marche de la révolte. Ainsi, les images de l'effigie de notre Président de la République, pendue, lors d'une marche festive a choqué, d'autant plus qu'une parodie de Tribunal populaire avait; auparavant procédé à cette "sentence "

Mais n'étions-nous pas, déjà là; au-delà de la "Fête"?. La fête peut aussi témoigner d'une volonté de prosélytisme (Marche des Fiertés, Gay Pride, Love parade, Fête de l'Huma….).

Elle peut aussi être un acte de soumission, paradoxalement, en atténuant les antagonismes par le Ludique, et en les rendant acceptables, bref en les "neutralisant". Cette soumission peut être involontaire. C'est l'aspect "gentillet", des fameux "pique-nique" citoyens et autres fêtes alternatives. Les "Gilets jaunes", avec rudesse ont rappelé les dures réalités de la lutte pour l'émancipation sociale .
Le Pouvoir inquiet de ces fameux samedis marqués par la violence, y répondant par la force, et la ruse de la fameuse" parole libérée" dans l'illusion d'un "Grand Débat" se serait très bien accommodé de Carnavals et de marches festives, peut être subversives, mais surement inoffensives .L'exécution  fictive d'un monarque présidentiel, renouant avec un acte fondateur de notre Histoire moderne, la marche sur le "Palais" de l'Elysée, et sur l'Assemblée nationale, sauvagement réprimée, ont marqué la fin d'une séquence dans laquelle, des citoyens n'avaient plus "envie de rire".

Même si la concentration de la haine sociale sur une personne, un nom, font oublier que les forces en présence, les antagonismes de Classe, dépassent et de loin la réduction à un "pathos", même lorsqu'il incarne l'Autorité suprême.

Depuis des années, très instrumentalisé, le Ludique a envahi l'espace de la contestation. Fin de l'"Internationale" chantée dans les cortèges syndicaux, et des cortèges graves et conscients des enjeux, comme en témoignent les documents photos du Passé!....¨Place à l'incontournable camion -sono, et au non moins incontournable Zebda, et ses "Motivés", balayant tout de la force de ses décibels, et transformant la gravité de l'engagement social, en un simple concert déambulant et gentiment contestataire. Il y a aussi l'omniprésente fanfare qui est là, pour rappeler l'aspect supposé archaïque des slogans de classe.

Qui oserait chanter l'"Internationale "ou les chants communards après U2 ?....". Franchement, camarade, tu ne vas pas chanter le "Temps des cerises", on est au XXI siècle!....

La Fête comme acte d'intégration à la Pensée dominante, est devenue un dogme. Fêtes des voisins, Fanfare de quartier, et autres, instrumentalisées par tout édile digne de ce nom, pullulent dans nos cités.
Quand un Maire déclare face à des citoyens excédés par le désordre urbain" je ne veux pas d'une ville aseptisée", tout est dit de l'émergence du concept de décadence, en lieu et place du légitime souci de retisser un lien social convivial, respectueux de tous. Dans une ville où les canettes de bières, tiennent lieu de revêtement urbain et ou l'ivrognerie est célébrée, officiellement  ces mots ont un sens.

De plus en plus, la "Fête" est institutionnalisée par les municipalités, à défaut de rétablir les combats de gladiateurs, aujourd'hui les "mises à morts «symboliques se faisant sur le Net ,Facebook et autres. Cela n'est pas nouveau, chacun a connu la fête de village dans laquelle l'ivrognerie sacralisée par Ricard était la valeur. Mais le phénomène apparait de plus en plus prégnant. Dans une société mondialisée, et en perte de repères, la fête peut être aussi un marqueur identitaire très fort.

Comment écrire sur la "fête" sans parler de la jeunesse, ?…..Détruire l'esprit critique dans la jeunesse, est une des fonctions de tout pouvoir, déjà, il y a 25 siècles, par l'empoisonnement du Philosophe, aujourd'hui  par la réduction de l'étude de la Philosophie à une portion congrue, par l'incitation au consumérisme; nous avons vu apparaitre dans certaines grandes surfaces, les caddies pour enfants, par l'éloge de l'alcool s'étalant sur de somptueuses affiches et arrêt de Tram. A Montpellier, les "assommoirs "se multiplient, dans lesquels à travers les "Afters " les " Before" et autres, toute une jeunesse célèbre le culte d'un Dionysos, qui a très bien résisté à la chute de l'Olympe. Un "Dionysos" qui s'est adapté: comment se dit" rouler un joint en grec classique?"...…

Mais, ne gardons pas de nos "successeurs», uniquement l'image d'adolescents titubant ou hystériques .Être nés bien après d’autres, nous semble justifier d'autres attributs. Une véritable appréciation de la Modernité, une diabolisation commune de l'Ancien Monde, celui des droits et de sa vision progressiste, sont les marques d'une jeunesse symbolisée au plus haut sommet du Pouvoir .

Il y a loin pourtant du symbole à la réalité d'un chômage qui ravage ceux nés dans les années 95. Il n'y pas de sentiment d'appartenance à une génération, sans le langage qui convient. Mais sous le masque de l'entreprise devenue" Start Up», du grand patron devenu "manager", d'un Président qui "tombe «la veste, de la clientèle, devenue "communauté", et d'un jeunisme devenu un dogme, une autre réalité sommeille.

En dehors de son aspect polémique, ce petit texte n'a d'autre but que de faire appel à la Philosophie pour clarifier ce champ où s'oppose une Modernité profondément réactionnaire , dans ses fondements idéologiques, à un Passé qui fut ancré dans l'idée de Progrès social. Il ne s'agit pas non plus, d'une mise en accusation de la jeunesse, mais de ce que l'on en a fait, et de ceux qui en manipulent le fil.



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