Le ludique
et le jeunisme : 2 dogmes modernes
Ce sujet semble un peu décalé, au regard des évènements que vit
notre pays actuellement, et dans lesquels; comme dirait notre Président
"le Tragique s'est enfin invité dans l'histoire européenne".
Sans remonter à des siècles de références, depuis toujours la
jeunesse et la fête ont été soit glorifiées, soit diabolisées. La fête, par un
de ses aspects, le Carnaval ,paisible, a pu aussi quelquefois
"secouer" l'ordre social, et sombrer dans le bain de sang .Pour
exemple, le Carnaval de Romans en 1580,verra les notables et les artisans
passer de l'épée de bois, aux armes réelles, et se massacrer après 15 jours de
fêtes danses, et théâtre. On relèvera des dizaines de cadavres. Au II me siècle
avant l'ère chrétienne, une Bacchanale va dégénérer à un point tel, que le
Sénat romain va procéder à des arrestations.
La fête est toujours un instant porteur de nombreuses
interprétations .Elle peut inquiéter l'ordre établi, car elle le tourne en
dérision, et appelle à l'irrespect; quelquefois première marche de la révolte. Ainsi,
les images de l'effigie de notre Président de la République, pendue, lors d'une
marche festive a choqué, d'autant plus qu'une parodie de Tribunal populaire
avait; auparavant procédé à cette "sentence "
Mais n'étions-nous pas, déjà là; au-delà de la
"Fête"?. La fête peut aussi témoigner d'une volonté de prosélytisme (Marche
des Fiertés, Gay Pride, Love parade, Fête de l'Huma….).
Elle peut aussi être un acte de soumission, paradoxalement, en
atténuant les antagonismes par le Ludique, et en les rendant acceptables, bref
en les "neutralisant". Cette soumission peut être involontaire. C'est
l'aspect "gentillet", des fameux "pique-nique" citoyens et
autres fêtes alternatives. Les "Gilets jaunes", avec rudesse ont
rappelé les dures réalités de la lutte pour l'émancipation sociale .
Le Pouvoir
inquiet de ces fameux samedis marqués par la violence, y répondant par la force,
et la ruse de la fameuse" parole libérée" dans l'illusion d'un "Grand
Débat" se serait très bien accommodé de Carnavals et de marches festives,
peut être subversives, mais surement inoffensives .L'exécution fictive
d'un monarque présidentiel, renouant avec un acte fondateur de notre
Histoire moderne, la marche sur le "Palais" de l'Elysée, et sur
l'Assemblée nationale, sauvagement réprimée, ont marqué la fin d'une séquence
dans laquelle, des citoyens n'avaient plus "envie de rire".
Même si la concentration de la haine sociale sur une personne,
un nom, font oublier que les forces en présence, les antagonismes de Classe,
dépassent et de loin la réduction à un "pathos", même lorsqu'il
incarne l'Autorité suprême.
Depuis des années, très instrumentalisé, le Ludique a envahi
l'espace de la contestation. Fin de l'"Internationale" chantée dans
les cortèges syndicaux, et des cortèges graves et conscients des enjeux, comme
en témoignent les documents photos du Passé!....¨Place à l'incontournable
camion -sono, et au non moins incontournable Zebda, et ses "Motivés",
balayant tout de la force de ses décibels, et transformant la gravité de l'engagement
social, en un simple concert déambulant et gentiment contestataire. Il y a
aussi l'omniprésente fanfare qui est là, pour rappeler l'aspect supposé
archaïque des slogans de classe.
Qui oserait chanter l'"Internationale "ou les chants
communards après U2 ?....". Franchement, camarade, tu ne vas pas chanter le
"Temps des cerises", on est au XXI siècle!....
La Fête comme acte d'intégration à la Pensée dominante, est
devenue un dogme. Fêtes des voisins, Fanfare de quartier, et autres,
instrumentalisées par tout édile digne de ce nom, pullulent dans nos cités.
Quand un Maire déclare face à des citoyens excédés par le
désordre urbain" je ne veux pas d'une ville aseptisée", tout est dit
de l'émergence du concept de décadence, en lieu et place du légitime souci de
retisser un lien social convivial, respectueux de tous. Dans une ville où les
canettes de bières, tiennent lieu de revêtement urbain et ou l'ivrognerie est
célébrée, officiellement ces mots ont un sens.
De plus en plus, la "Fête" est institutionnalisée par
les municipalités, à défaut de rétablir les combats de gladiateurs, aujourd'hui
les "mises à morts «symboliques se faisant sur le Net ,Facebook et autres.
Cela n'est pas nouveau, chacun a connu la fête de village dans laquelle
l'ivrognerie sacralisée par Ricard était la valeur. Mais le phénomène apparait
de plus en plus prégnant. Dans une société mondialisée, et en perte de repères,
la fête peut être aussi un marqueur identitaire très fort.
Comment écrire sur la "fête" sans parler de la
jeunesse, ?…..Détruire l'esprit critique dans la jeunesse, est une des
fonctions de tout pouvoir, déjà, il y a 25 siècles, par l'empoisonnement du
Philosophe, aujourd'hui par la réduction de l'étude de la Philosophie à
une portion congrue, par l'incitation au consumérisme; nous avons vu apparaitre
dans certaines grandes surfaces, les caddies pour enfants, par l'éloge de
l'alcool s'étalant sur de somptueuses affiches et arrêt de Tram. A Montpellier,
les "assommoirs "se multiplient, dans lesquels à travers les
"Afters " les " Before" et autres, toute une jeunesse
célèbre le culte d'un Dionysos, qui a très bien résisté à la chute de l'Olympe.
Un "Dionysos" qui s'est adapté: comment se dit" rouler un joint
en grec classique?"...…
Mais, ne gardons pas de nos "successeurs», uniquement
l'image d'adolescents titubant ou hystériques .Être nés bien après d’autres,
nous semble justifier d'autres attributs. Une véritable appréciation de la
Modernité, une diabolisation commune de l'Ancien Monde, celui des droits et de
sa vision progressiste, sont les marques d'une jeunesse symbolisée au plus haut
sommet du Pouvoir .
Il y a loin pourtant du symbole à la réalité d'un chômage qui
ravage ceux nés dans les années 95. Il n'y pas de sentiment d'appartenance à
une génération, sans le langage qui convient. Mais sous le masque de
l'entreprise devenue" Start Up», du grand patron devenu
"manager", d'un Président qui "tombe «la veste, de la clientèle,
devenue "communauté", et d'un jeunisme devenu un dogme, une autre
réalité sommeille.
En dehors de son aspect polémique, ce petit texte n'a d'autre
but que de faire appel à la Philosophie pour clarifier ce champ où s'oppose une
Modernité profondément réactionnaire , dans ses fondements idéologiques, à un
Passé qui fut ancré dans l'idée de Progrès social. Il ne s'agit pas non plus,
d'une mise en accusation de la jeunesse, mais de ce que l'on en a fait, et de
ceux qui en manipulent le fil.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
1 - Tout commentaire anonyme (sans mail valide) sera refusé.
2 - Avant éventuelle publication votre message devra être validé par un modérateur.