jeudi 11 février 2016

Sujet du Merc. 17/02 : « Ça crie mais ne sent point » » Malebranche





« Ça crie mais ne sent point » » Malebranche



Fontenelle fit un jour une visite à Malebranche et il relate l’anecdote suivante : « Une grosse chienne de la maison, et qui était pleine, entra dans la salle où ils se promenaient, vint caresser le  Malebranche et se rouler à ses pieds. Après quelques mouvements inutiles pour la chasser, le philosophe lui donna un coup de pied, qui fit jeter à la chienne un cri de douleur et à Monsieur de Fontenelle un cri de compassion. Eh ! Quoi, lui dit froidement Malebranche, ne savez-vous pas que cela ne sent point ? ».  

 Malebranche est connu comme disciple de Descartes et sa réaction pourrait faire penser à l’option cartésienne des « animaux-machines ». Mais Descartes est bien plus subtil que ses disciples supposés. Pour lui :
-          « si les animaux sont des automates, ce sont des machines infiniment subtiles parce que construites par Dieu, alors que les machines automates produites par l'homme sont élémentaires ».
-          « quoique je regarde comme une chose démontrée qu'on ne saurait prouver qu'il y ait des pensées dans les bêtes, je ne crois pas qu'on puisse démontrer que le contraire ne soit pas, car l'esprit humain ne peut pénétrer dans leur cœur. »
-          Ce qu’il refuse aux bêtes ce n'est que la pensée :  « Car je ne leur ai jamais dénié ce que vulgairement on appelle vie, âme corporelle et sens organique. »
-          « Je parle de la pensée, non de la vie, ou du sentiment, écrit-il. Car je n'ôte la vie à aucun animal, ne la faisant constituer que dans la chaleur du cœur. Je ne leur refuse pas même le sentiment autant qu'il dépend des organes du cœur. »

Quatre siècles plus tard on assiste a une inversion totale de la problématique homme/animal. Les développements scientifiques, l’élevage intensif, le peuplement de la terre sont vus comme des dangers et la nature comme la source d’une nouvelle réflexion morale.

Aujourd'hui la pensée écologiste vulgaire a le plus souvent tendance à poser que ce qui est de l'ordre de la nature bénéficie d'un a priori positif, tandis que ce qui est artificiel, c'est à dire relève de l'activité humaine, est a priori suspect. 

Cette dérive qui se niche désormais dans l’ensemble des discours « philosophiques » et ….publicitaires, est devenue une idéologie, c'est-à-dire un ensemble de propositions dissolvant les frontières entre homme et animal, humanité et animalité. Les hommes sont violents …. Comme les animaux, ils n’ont besoin que de boire manger et se reproduire. Entre eux et nous pas de différence de nature. Mais a ne plus voir de frontières on finit par franchir certaines limites …..

En 2001 Jacques Derrida, invité pour faire la promotion de son dernier livre écrit avec la psychanalyste Elizabeth Roudinesco, répond aux questions posées par le journaliste à propos du rapport aux animaux.
.La première question a porté sur l'autorisation ou l'interdiction morale d'écraser des cafards. Jacques Derrida a répondu :       
« Non, il n'y a pas interdiction de tuer quand c'est nécessaire, je demande seulement qu'on éprouve un peu de compassion et de culpabilité ».
.Puis un peu plus tard : « Il faudra bien qu'on revoie l'élevage industriel concentrationnaire, qui constitue un véritable génocide animal ».

 Derrida, qui se prétend philosophe, ne connaît pas le sens de mots simples comme génocide ou élevage, qui sont exactement le contraire l'un de l'autre, puisque le génocide consiste à exterminer une population apparentée par des liens génétiques et que l'élevage, au contraire, perpétue des races animales.

L'école humaniste pense que les animaux n'ont pas de droits, mais que l'homme a des devoirs envers sa propre dignité qui lui interdisent d'avoir des comportements cruels envers les animaux et de leur faire subir des souffrances inutiles ; cette morale est à l'origine du droit de la protection des animaux, ce qui est tout autre chose que les droits des animaux

« …. Nous nous inquiétons d'assister, à l'aube du XXléme siècle, à l'émergence d'une idéologie irrationnelle qui s'oppose au progrès scientifique et industriel et nuit au développement économique et social.

Nous affirmons que l'état de nature, parfois idéalisé par des mouvements qui ont tendance à se référer au passé, n'existe pas et n'a probablement jamais existé depuis l'apparition de l'homme dans la biosphère, dans la mesure où l'humanité a toujours progressé en mettant la nature à son service, et non l'inverse.  
   
Les plus grands maux qui menacent notre planète sont l'ignorance et l'oppression et non pas la science, la technologie et l'industrie dont les instruments, dans la mesure où ils sont gérés de façon adéquate, sont des outils indispensables qui permettront à l'humanité de venir à bout, par elle-même et pour elle-même de fléaux tels que la surpopulation, la faim et les pandémies.
»               
 (Appel de Heidelberg – 01 Juin 1992)


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