MOI,
TERRORISTE ?
Ce
«moi », qui est-ce ?
C'est celui qui lisant l'intitulé est en quelque sorte
contraint, ne serait-ce qu'un instant, à se tarauder les méninges
d'interrogations quant à son implication, directe ou à peine consciente, dans
des actes de violence majeurs. Pourtant, par le simple fait qu'il est partie
prenante à la société, ne sait-il pas qu'il est au moins en partie responsable
des actes de violence majeure que commet cette société ? Peut-il en être
autrement, sauf à se dédouaner de son absence de résistance ? A tout laisser
faire sans (ré)agir, peut-on s'exonérer de la responsabilité de toute
conséquence induite ? La violence en question peut être physique, instantanée
ou répétée. Mais elle peut aussi être symbolique, culturelle, politique,
économique, sociale, psychique et se dérouler sur un laps de temps plus ou
moins long qui nous la rend presque inconsciente par sa banalité. Cela souligne
l'énormité de cette violence.
Il
s'agit aussi de se demander ce qu'est un « terroriste » et si sont nombreux
ceux qui au moins confusément sauraient qu'ils en sont un, que ce soit
individuellement ou en groupe et que le groupe soit épars ou organisé. Un
terroriste frappe d'épouvante d'autres hommes ou lui-même, par des actes de
grande violence provoquant crainte majeure, frayeur, peur panique, épouvante.
Déjà,
ne crée-t-il pas une situation de déni
de réalité auto-induit par laquelle le réel le rattrape bientôt sans ménagement
celui :
1)
qui se laisse aller à confusément ignorer le monde qui l'entoure, par exemple
en s'illusionnant sur ce que sont vraiment les programmes politiques et la
volonté des dirigeants qu'il élit ou laisse élire, ou celui :
2)
qui s'invente des mondes illusoires et s'y enferme ? Cette attitude, reproduite
par des foules innombrables d'egos à la dérive, ne crée-t-elle pas une
situation générale de violence terrorisante ? Pour les individus, pris
isolément ou en masse, ce choix ne les plonge-t-il pas dans ces craintes,
frayeur et épouvante que leur inflige le parti pris conscient ou implicite
d'une terreur dirigée contre eux-mêmes ? En sont-ils conscients ?
Par
ailleurs, un individu (moi et mon ego) ou un groupe organisé (des egos réunis
dans une même intention) peuvent frapper de terreur. Le « moi » peut être
personnel et porter sciemment sa terreur réfléchie sur d'autres hommes. Le «
moi » peut aussi être collectif et uni en un groupe terroriste soudé. Il peut
être 1) un groupe mafieux, nihiliste, idéologique, religieux ou 2) même et
peut-être surtout un Etat légalement institué et reconnu internationalement.
Ainsi, la terreur publique ou privée peut émerger d'une idéologie. Dès lors que
penser de la terreur légale ? Est-elle légitime ? Dans la praxis du réel, quel
est son rapport à l'éthique ? Sachant que l'éthique se comprend comme la simple
légitimité de ne considérer tout être humain non pas seulement comme un moyen
mais toujours comme une fin (Kant).
Un
Etat, un groupe qui impose une idéologie – religieuse ou autre – la fondent le
plus souvent sur une ou plusieurs croyances fausses. (Rappelons que la
philosophie tend précisément à débouter les croyances fausses par sa recherche
de connaissances authentiques.) A cet égard, ces entités peuvent avoir des
menées physiquement destructrices et meurtrières à grande échelle. Mais elles
peuvent aussi avoir subrepticement des menées destructrices de l'intellect et
de la raison privant de l'usage de l'entendement et de la liberté de se libérer
une personne seule ici, des populations là-bas et maintenant partout l'humanité
tout entière. La violence symbolique,
culturelle, politique, sociale ou psychique qui se développe sur un terme plus
long en est-elle moins terrifiante pour autant ? Ou, au contraire, ne
l'est-elle pas plus encore ?
Déjà
sous la Révolution la Terreur menée par le Comité de salut public fut suivie
d'une aussi meurtrière réaction contre Robespierre et ses soutiens ? La terreur
exercée par les trois monothéismes et les hécatombes dans le monde de centaines
de millions de crève-la-faim chaque année sont évitables parce que les moyens
sont là. Pourtant la volonté manque à cet égard. Ou bien est-ce le contraire
qui est sciemment poursuivi ?
En effet le capitalisme débridé de presque toute
règle et éthique ne s'autorise-t-il pas une terreur maximale, à la hauteur des
profits recherchés, qui broie tant les corps là-bas (et sans doute bientôt à
nouveau ici!) que les cerveaux partout ? Le fait-il avec le concours de nos
sujétions volontaires, ou celles-ci sont-elles seulement trop ignorantes que
pour réagir ?
Aujourd'hui un Spinoza dirait que nos « é-dispositifs » dévoilent
tout de nous aux « Grands Frères débonnaires » qui en purs terroristes se font
ensuite causes agissantes de nos vies entières. Il ajouterait que la
philosophie permet de voir clair dans ce « jeu » et d'entamer à partir de là
une lutte en « connaissance de causes » contre les terrorismes d'Etat et privés
imbriqués. Cela justifiera qu'ils nous singularisent en retour comme
terroristes.
Parce que la philosophie est radicale.
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