vendredi 10 février 2023

Sujet du 15 Février 2023 : La bêtise : une philosophie supérieure ?

 ATTENTION CHANGEMENT DE LIEU :
20H30 SALONS DU GRAND HOTEL DU MIDI, PLACE DE LA COMEDIE.

La bêtise une philosophie supérieure ?

    
ARTURO qui avait sa réputation bien établie et son blog bien à jour (nonjenesuis.com), fut contacté sur Internet et invité à assister à un   «  Café-philo de cons ». Il avait été ciblé, par les philosophes de comptoir, car c’était plus simple, pour eux, de s’adresser à un inconnu de très faible QI, plutôt qu’aux empêcheurs de tourner en rond qu’ils subissaient régulièrement. Ils pensaient qu’ainsi, pour pouvoir baver leurs supposés savoirs intellectuels, étaler leurs couches pleines de …culture, ou déverser leur logorrhée verbale, un faire-valoir comme ARTURO pourrait faire l’affaire. Ce dernier n’était- il pas un typique cagot des Pyrénées, un cousin des crétins des Alpes, un supporter acharné des Ch’tis de Paris ? N’avait-il pas, jadis, servi de cobaye pour des expériences sociologiques sur l’importance des horoscopes décalés, au prétexte qu’il serait né sous le signe du Chacal (ascendant Limace) ?

 

Après les présentations d’usage, les débatteurs commencèrent à traiter du sujet suivant : « La raison raisonnante doit-elle dépasser la raison raisonnable ou bien doit-elle se laisser dépasser par la raison raisonnée ». Tout un programme !

Les intervenants patentés, fiers de prendre la tribune et flattés du roucoulement de la partie la plus aviaire de leur public, tentaient désespérément de démêler l’écheveau des concepts à l’ordre du jour : raison, raisonner, raisonnable, raisonnement. On frôla même l’incident lorsqu’un poète, complètement hors sujet, confondit raisonner et résonner. Ce fut le moment que choisit l’animateur, quelque peu dépassé, de s’intéresser à ARTURO.

 

- ARTURO, vous avez maintenant la parole. Pouvez vous en profiter pour nous dire si, selon vous, le tambour est un objet de résonance ou bien un sujet de raisonnement ?

ARTURO intervint donc à son tour :

« Le centre de gravité de la bêtise d’aujourd’hui se situe sans doute dans cette critique de plus en plus radicale du discours rationnel.

 

 A une époque où il n’y a plus grand-chose à transgresser, le seul refuge face à la rationalisation croissante des comportements et du discours est la bêtise. Cette résistance rejoint une certaine tradition religieuse. Comme le souligne Avital Ronell, philosophe américaine auteur de Stupidity, un essai sur la bêtise, le christianisme « représenta, sur la scène occidentale de la bêtise, un phénomène jusqu’alors inconnu » parce qu’il « repose sur une certaine bêtise et sur une certaine aversion de la sagesse et de la science temporelle ».

La connaissance de ma propre nullité et de l’absurdité du monde, solidaires de l’affirmation d’un possible salut divin, débouche sur la promotion de ma bêtise. Il ne faut pas vous-même vous en étonner, alors que votre proximité avec le christianisme abonde dans ce sens.

Quand j’étais moi-même un chanteur renommé et que j’avais créé un univers étrange et stupide qui plaisait beaucoup à mon public, j’avouais ma fascination pour la figure de Jésus, « le premier idiot sur terre » ; Dans mes délires les plus créatifs, je m’identifiais à lui car « il faisait des trucs que personne ne faisait, et tout le monde se foutait de sa gueule ». L’homme bête repousse la toute-puissance de la raison discursive, refuse la simpliste distinction du savoir et de l’ignorance, et s’offre au salut.

L’animateur, assez interloqué par cette tirade inattendue, questionna ARTURO :

 

- Les nouveaux bêtes seraient-ils alors l’avenir du christianisme, des religions en général ?

- Pas forcément. Mais cette déferlante de la dérision à laquelle on assiste actuellement signifie au moins une perte de confiance dans la rationalité du réel. Comme je le lisais récemment dans un livre de Harry G. Frankfurt 
« L’art de dire des conneries » : « La prolifération contemporaine du baratin [bullshit] a des sources encore plus profondes dans les diverses formes de scepticisme qui nient toute possibilité d’accéder à une réalité objective et par conséquent de connaître la nature véritable des choses ». Au fond, la bêtise serait peut-être le sommet de la sagesse, dans le sens où elle remet en question notre domination du monde.

La bêtise : une nouvelle philosophie ?          

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