Peut – on conserver notre modèle social en le réformant ?
J’ai posé cette question pour avoir entendu tout récemment un élu déclarer
« la France peut conserver son modèle social en le
réformant » Pour ce Politique faisant du sophisme sans s’en rendre
compte comme Monsieur Jourdain de la prose cela semble aller de soi.
Or dans une acception
populaire, conserver : « c’est
maintenir en l’état », réformer :
« c’est modifier progressivement et sans
violence »
Dés lors qu’on ne peut soutenir simultanément une chose et son contraire cette thèse est - elle
crédible ? ou n’est elle que l’expression d’un démagogue soucieux de populisme ?
Tout d’abord
cette question est sous tendue par le postulat suivant lequel il existe, à l’image de l’exception culturelle française, une exception du modèle social
français. C’est-à-dire une
politique sociale qui vise à faire prévaloir notre modèle. Il est
donc utile de commencer par questionner
le sujet sous cet angle. Puis de définir ce que l’on entend par réformer et
conserver avant d’opposer ces deux
termes appliqués au modèle social
français.
Qu’est ce
qu’un modèle social ? Y - a – t’il
un modèle social français ?
Un modèle social : c’est un
ensemble de caractères formant un système donné - pour servir de référence sur le plan social - et appliqué à un groupe
d’êtres humains considérés comme un tout
et aux rapports de ces individus entre eux.
Un modèle
social se définit par son essence, ce qui fait qu’il est ce qu’il est.
Quelle est l’essence du
modèle social français. En quoi Le
modèle social français est –il un modèle ?
Le présent étant formé de l’épaisseur du
passé, le modèle social français
est le digne héritier de l’histoire
de la France formaté au fil du temps par une culture judéo – chrétienne de la culpabilité , puis par l’esprit de
liberté de la révolution et de la montée de l’individualisme et de la
déclaration des droits de l’homme de 1789 mettant en avant le bonheur pour tous, l’idéologie antagoniste de lutte des
classes de Marx,((1818-1883), de l’esprit syndicaliste majoritairement combatif
dominant partagé entre réformiste et révolutionnaire né avec l’apparition des
sociétés industrielles, la
reconnaissance conférée aux travailleurs
par le front populaire porté au pouvoir
en 1936, les évènements de mai 68 qui ont permis une avancée du droit des
femmes, le confort de l’état providence et le développement d’une mentalité d’assistanat,
les avancées sociales
régulières rendues possibles par « les trente glorieuses » et considérées comme des droits acquis puis le
tournant libéral des années 80 débouchant sur la mondialisation
et le retour de la gauche au pouvoir
et des espoirs insatisfaits.
A chacun de ces événements
qui ont joué un rôle majeur dans l’ édification de la condition ouvrière moderne
ont correspondu l’octroi d’avantages sociaux qui se sont cumulés par effet de cliquet et de
citer : en 1936 les accords de
Grenelle : deux semaines congés payés, la semaine de quarante heures, l’
extension des conventions collectives ; en 1945, la création de la
sécurité sociale, des comités d’entreprise, des délégués du personnel ;
en 1950 le SMIG ; en 1982 la
cinquième semaine de congés payés, la semaine de 39 h , la retraite à 60 ans etc…
autant de pierres d’un modèle bâti a travers les siècles par les
luttes et le sang avec le soucis Kantien
de prendre l’homme comme une fin et jamais comme un moyen. .
Mais tout s’écoule disait Héraclite. Tout est mouvement
et l’époque moderne avec le développement de la mondialisation entraîne des
changements continus et accélérés dans
la gestion des entreprises
notamment dans les conditions de travail qui servent de variables d’ajustement
entraînant la déconstruction rampante de notre modèle social c'est-à-dire un retour en arrière au sens du mot réforme.
Tout est dans tout, il n’existe pas de modèle intangible et la
mise en place d’une pratique d’adaptation permanente inévitable du modèle
social français serait davantage plus
crédible et recevable que celle de la
voix des réformes partielles et décousues mais induisant des remises en
question brutales perçues d’abord comme un effondrement des fondements économiques et
sociaux de notre modèle.
Au-delà d’une harmonisation continue et Si elle veut s’adapter aux
mutations économiques du 21° siècle, la France sera
t’ - elle capable de saisir l’occasion de penser et d’aller jusqu’à bâtir un autre modèle de
Société cohérent, plus juste et qui placerait l’homme au cœur du système.
Rien n’est moins sur.
Pour le moins le langage
tenu par ce politicien est irresponsable,
tant il apparaît difficile, voire impossible de réformer notre modèle sans
porter atteinte à son esprit.
qu’en pensez - vous ?
Yves Le Bars 30/05/2013
Glossaire :
Sophisme : raisonnement qui n’est logiquement qu’en apparence et qui est
conçu avec l’intention d’induire en
erreur. (par opposition au paralogisme).
Réformer est un emprunt (1171) du latin reformare
« rendre à sa première forme ,refaire » , d’où rétablir, restaurer - re
marquant le retour en arrière et formare = former ,
réformer fut
ensuite utilisé comme terme moral et institutionnel appliqué à une discipline
religieuse
ayant pour objet de
ramener l’observance d‘une règle qui
s’est relâchée ( CF. la progression du
protestantisme au 16° siècle) puis l’idée de réformer s’effacera au profit de celle d’améliorer.
Spécialement au sens figuré de ramener (qqn, qqch)
à une forme meilleure.
sur le plan politique, réformer consiste à modifier progressivement (c’est la thèse
socialiste) sans violence par opposition à révolutionner (c’est la thèse
communiste).
Conserver est emprunté au latin conservare
dont il reprend le sens sauver,
garder, préserver, garder intact
Adapter : ajuster, appliquer, mettre en accord avec , en harmonie,
approprie.
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