lundi 9 août 2021

Sujet du Merc. 11 Aout 2021 : FETICHE, OU ES-TU ?

                                           FETICHE, OU ES-TU ?

 

Le fétichisme est ce report de l'affectivité sur un objet symbolique, fabriqué et unique en lui attribuant une efficacité ultime sur la réalité, efficacité liée à des manigances magiques dont les intéressés peuvent même n'être pas conscients. Un fétiche devient alors un objet auquel on attribue un pouvoir bénéfique largement imaginaire. C'est un objet qu'on fabrique de telle façon qu'on s'abuse soi-même en croyant ne pas l'avoir fabriqué. Un comble ! Et pourtant aujourd'hui, nous croyons échapper à tous les fétiches alors même que nous nous laissons aller partout et sans cesse à nombre d'idées et de vues de l'esprit métaphysiques et totalisantes.

 

Un exemple souvent inconscient : la croyance moderne au progrès qui prête à la science une puissance quasi magique. C'est aussi notre représentation scientifique de l'univers strictement matériel, froid, écrasant et absurde pour les hommes. C'est la croyance au Grand Tout, avatar du Dieu omni présent et potent, de tout temps.

 

       Fétiche, où es-tu, qui es-tu ?

       Je suis tout, l'absolument tout à tout instant, pour toujours. Je le suis aujourd'hui plus que jamais.

       Tu es le Grand Maître ! Mais, en fait, ne serais-tu pas plutôt le fruit de notre imagination, de nos affects ?

       Qu'est-ce cela, petit taquin souffreteux ! Contente-toi de croire. Je suis le Grand Tout. Laisse-toi bercer par cette idée qui apaise ta vie de souffrances et ta frayeur de la mort qui t'attend.

       J'ai peur !

 

Les dieux et Dieu sont venus à la conscience des hommes sous deux formes de religion. Même si cela bouscule, la représentation scientifique moderne du monde ne fait-elle pas partie de la première ? Là, le fétichisme est cette perception d'un principe du monde ou archè qui englobe tout, maîtrise tout, organise tout. Cet absolu, l'univers est cette existence unique de l'infini dans lequel soi-disant nous nous trouverions. N'est-elle pas que cette immensité glacée dépourvue de sens humain, absurde, toute réunie en une froide équation mathématique. N'est-elle pas cette tentative, parmi d'autres qui l'ont précédée et lui survivent et prospèrent, d'insuffler du sens précisément là où les hommes en demandent pour faire ordre et société entre eux et apaiser leurs craintes ? Finalement, ne serait-ce pas un invariant ? Ou, alors, un mirage ?!

 

Pour l'autre forme de religion, il n'existe pas qu'une seule conception de l'infini, qu'une seule vision de la religion vraie, mais un nombre infini d'entre elles. Elle correspond à une attitude d'ouverture maximale envers les autres comme ce fut le cas lors de l'apparition chez les premiers hommes du sentiment religieux.

 

Le premier ordre religieux est toujours partout parmi nous. C'est l'autorité du Conseil scientifique (et médical) in fine dévoilant les mécanismes de domination de la société. C'est la finance hyperbolique des algorithmes fétiches qui saborde la vie. C’est l’équivalence de tout à l'argent comme fétiche. Equivalence, identifiée par Marx, à la vie moderne soumise à la division du travail atteignant aujourd'hui les ultimes confins du monde et des affects. Ainsi que l'avait bien compris Edward Bernays qui propulsa la guerre puis le capitalisme des pulsions*. Nous ne cessons d'échanger et d'acheter des objets et des services marchands sans savoir comment ils sont réellement produits et comment ils obtiennent leur valeur.

 

Et c'est aussi cet absolu des autorités monothéistes quasi psychotiques. Et par-dessus le marché, nous nous inventons encore d'autres fétiches à profusion : l'Ecologie, la Planète et la Pancha Mama, le Climat décarboné, les idoles du sport et de la mode, les stars du cinéma, les milliardaires allumés des GAFAM qui s'envoient « en l'air ».

 

Plus prosaïquement, c'est encore d'autres institutions : l'Etat, des textes de loi, l'armée et la police, le directeur ou, plutôt, la directrice. Et puis c'est aussi l'Amour et même le genre (173 variétés officiellement répertoriées dans le monde) et autres LGBTQ ou GPA-PMA, le manager de supérette, l'aiguilleur du ciel et … le scientifique...

 

Bref, attribuer à un « sujet de savoir » anonyme qu'il s'inquiète de l'ordre est une forme de fétichisme dont nous ne pourrons sans doute jamais nous défaire entièrement. (Je mesure bien que j'en fais sans doute moi-même partie à cet instant de pontification philosophique.) Appelons ça la croyance au « Grand Autre présumé savoir » (Lacan), le Big Brother (G. Orwell).

Ainsi, « avons-nous confié à la science la position de garant de la rationalité de l'ORDRE SOCIAL (les rebondissements de la pandémie Covid en sont une illustration patente qui nous est « offerte » de vivre). Mais agissant ainsi, nous lui en demandons mille fois trop, car aucune analyse scientifique ne pourra jamais nous affranchir de la renégociation personnelle des règles de notre vie commune pour les instaurer dans des fondements raisonnables. La fétichisation de la science n'aboutit qu'à une seule chose : nous projetons nos désirs d'ordre et nos idées sur un conseil d'experts qui ne saurait tout simplement même pas exister, un conseil d'experts qui décide à notre place de tout ce qui concerne la manière dont nous devrions effectivement vivre. »

 

Le Grand Autre est celui dans lequel on s'intègre en renonçant à nos responsabilités. Il est plus facile de croire et de vivre dans l'idée que les choses sont déjà réglées plutôt que de vivre, en se souciant que ça ne s'écroule pas autour de nous, en coopérant socialement avec les autres.

 

Le premier outil pour saper tout ça, c'est sans doute de sans cesse comprendre et rappeler qu'un fétiche n'est rien d'autre que notre projection de forces surnaturelles sur un objet que nous avons nous-mêmes créé. Ça alors ! Quelle imposture ! Créer ou adopter sans cesse un fétiche est pourtant tout à fait commun après des millénaires de platonisme et de monothéisme ! C'est cette tendance à se prendre pour la créature d'un autre en intégrant notre identité à un tout rationnel. Nous nous sentons rassurés quand nous nous imaginons être une partie d'un tout que nous sommes capables de comprendre d'une manière ou d'une autre. Rationnelle ou à peu près.

 

La question est de savoir dans quelle mesure nous serons jamais capables de nous défaire complètement de cette disposition d'esprit a priori confortable. Et comment ?

 

*   Rechercher dur le web : « BERNAYS-Comment manipuler l'opinion ».

 

lundi 2 août 2021

Sujet du Merc. 04 Aout 2021 : Le complotisme : mythe ou réalité ?

 

Le complotisme : mythe ou réalité ?


Je complote
Tu complotes         
Il complote  
Nous complotons : Le complotisme mythe ou réalité ?

Bille Gates en 2015 anime une conférence à Berlin en tant que philanthrope, sa fondation participe à de vastes campagnes de vaccination. Il se permet un discours ou il explique que dans les dangers qui menace l’humanité il faudrait plus s’inquiéter des risques de pandémie que d’une 3 ° guerre mondiale.

Début 2020 cette vidéo ressort avec des commentaires plutôt favorables perçue comme une réflexion d’un visionnaire.

Mais très vite une autre interprétation va apparaitre pour faire place à une réflexion inverse. Comment pouvait-il savoir qu’une pandémie arriverait ? Ce n’est pas de la perspicacité, s’il a dit ça, c’est donc qu’il savait. … Donc c’est Bill Gates qui a peut-être répandu ce virus pour mieux vendre un vaccin potentiel. Et une dernière version de cette conspiration envisage la possibilité d’une introduction d’une puce 5G pour pouvoir nous tracer.

Il faut comprendre que les hypothèses en cascades invraisemblables vont faciliter le buzz et grandement participer la diffusion en masse sans nuire à la crédibilité de la thèse complotistes. Car il laisse croire aux gens à une sorte de libre arbitre raisonnable. L’individu pensera : la puce 5 G je n’y crois pas, mais pour le reste il y a forcément du vrai.

Ces gros sujets de complotismes sont régulièrement dénoncés dans tous les médias avec d’abondantes chroniques documentés. Car les journaux voient par là une occasion de refaire leur légitimité en insistant sur la rigueur de leur propre travail qui serait bien au-dessus de cette information vulgaire diffusée par le peuple. Sans cacher leurs combats avec la concurrence déloyales des méchants réseaux sociaux. De grands médias (libération, Le Monde, Arte) ont eu l’arrogance de créer des supports spécialement dédiés au démontage de thèses conspirationnistes avec une mise en scène de laboratoire scientifique (LES DECODEURS) alors qu’ils ont autant de partie pris que n’importe quel média.

Oui mais voilà, il reste que ce n’est pas satisfaisant pour comprendre la totalité du phénomène. Car les gens ne sont pas forcément victimes simplement d’une curiosité malsaine.

En effet tout le monde cherche à comprendre la société et surtout les causalités multiples de notre époque et quel que soit les idéologies il restera toujours des zones d’ombres qui échappent à toutes explications. Les théories économiques ou les bonnes intentions politiques ne parviendront jamais à éclaircir la totalité des réalités qui nous entourent. Si vous ajoutez à ça le sentiment d’injustice que génère nos sociétés vous créez un terrain favorable à des croyances ou des théories qui peuvent s’avérer fausses.

Le complotisme peut également être reproché de manière abusive à toute personne qui pourrait élaborer un raisonnement économique un peu nouveau. Il est même devenu une facilité pour refuser tout argument de son adversaire sans plus d’explication.

Le conspirationnisme est décrit par Pierre-André Taguieff comme « la vision du monde dominée par la croyance que tous les événements, dans le monde humain, sont voulus, réalisés comme des projets et que, en tant que tels, ils révèlent des intentions cachées — cachées parce que mauvaises. 

Le complotisme est le plus souvent une mauvaise réponse ou une facilité à de vrais problèmes ou de vraies questions. Il y a aussi l’idée confuse que le vrai pouvoir échappe partiellement aux gouvernements.

Mais une corrélation n’implique pas nécessairement une causalité.

Malgré tout il reste un moyen de faire la part des choses assez facilement, qui consiste à ne pas ou à écarter si possible, l’intention dans la réalisation ou la constatation de chaque malheur qui nous entoure.

Ne pas oublier que Karl Marx est peut-être le plus grand philosophe matérialiste, mais dans son œuvre « le Capital » il démonte un système, qui selon lui est mauvais (paupérisation), et est voué à s’effondrer (baisse tendancielle du taux de profit). Certes il reproche aux bourgeois de s’accrocher à la propriété des moyens de productions, mais ne leurs reproche rien d’autre en réalités d’où la force de sa théorie. Marx nous dit que le système est mauvais, qu’il ait raison ou tort, c’est autre chose.

Doit-on vraiment aller plus loin que lui dans la critique du truc qui nous fait vivre ?

Sujet du Merc. 17 Avril 2024 : L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme …

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