Faut-il
perdre son temps à gagner sa vie?
Dans une conversation, un intervenant a dit cela: plus on travaille plus
on crée du chômage pour les autres.
Dans la publication de Jérémy Rifkin
intitulé " la fin du travail " (1996), l'auteur affirme que la
quantité de travail nécessaire pour produire les biens dont on avait besoin
serait de plus en plus faible, étant donnés les formidables gains de
productivité réalisés, et que seuls les emplois susceptibles de se développer
dans les usines à venir seraient ceux des "manipulateurs de symbole",
emplois très qualifiés et en très petits nombres. Pour éviter qu'une très forte
partie de la population ne voie son avenir réduit au chômage, il recommandait
donc de développer à grande échelle un tiers secteur, communautaire et
relationnel, donnant ainsi un coup d'arrêt à l'économie marchande. Ceci amène la
réduction du temps de travail ou à la flexibilité de celui ci.
C'est au
XVIII ème siècle que le terme
travail trouve très clairement son unité. A bien lire Adam Smith et ses
contemporains, le travail est une unité de mesure, un cadre d'homogénéisation des
efforts, un instrument permettant de rendre différentes marchandises et
différentes actions comparables. Le temps est son essence, mais même s'il
devient le fondement de l'ordre social, le travail n'est en aucune manière
"valorisé", "glorifié". Il reste chez Smith et ses
contemporains synonyme d'effort, de sacrifice comme Karl Marx le reprochera
plus tard. Le XVIII ème siècle voit donc l'invention du concept de travail
comme "ce qui produit de la richesse", ou comme on dirait aujourd'hui
: "un facteur de production". C'est à l'époque même où se développent
les conditions de travail inhumaines et où fleurissent les discours sur le
paupérisme que se met en place une véritable idéologie du travail. Le travail
devient synonyme d'œuvre. Dans l'objet que je fabrique je mets quelque chose de
moi même comme l'indique Marx. Lorsque le travail ne sera plus aliéné et
lorsque nous produirons de manière libre, alors nous n'aurons plus besoin du
médium de l'argent. Les biens et les services que nous produirons nous dévoilerons
les uns aux autres tels qu'en nous mêmes. "Supposons, écrit Marx, que nous
produisions comme des êtres humains. Nos productions seraient autant de miroirs
où nos êtres rayonneraient les uns vers les autres. Ce n'est plus seulement
l'abondance matérielle que poursuit l'humanité, mais l'humanisation, la
revalorisation du monde".
Parallèlement chez Marx comme chez P J
Proudhon, L. blanc et dans l'ensemble de la pensée socialiste mais aussi
libérale, le travail est devenu synonyme d'activité humaine, pleinement
humaine. L'activité propre de l'homme s'appelle travail, et le travail est
l'activité fondamentalement humaine.
Cependant Marx demeure cohérent. Il sait
fort bien que le travail n'est pas encore cette liberté créatrice ou du moins
qu'il ne l'est qu'en soi, pas encore en réalité. Il ne le deviendra que lorsque
nous produirons librement, c'est à dire lorsque le salariat aura été aboli, et
que l'abondance aurait été atteinte. Alors le travail ne sera plus peine,
souffrance ou sacrifice, mais pure réalisation de soi, pleine puissance et
expression, et la différence entre travail et loisir sera aboli
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
1 - Tout commentaire anonyme (sans mail valide) sera refusé.
2 - Avant éventuelle publication votre message devra être validé par un modérateur.