jeudi 13 février 2014

Sujet du 19 février : Le rire.



                                                Le rire. 
Le rire et ses deux faces
  1. Le rire de nature

  1. Le rire d’enfermement
a.    Le rire du vulgaire
b.    Le rire du criminel

  1. Le rire de nature.
Le rire est l’inverseur des pôles, le décrocheur de la vérité et du mensonge qui ne sont que les deux faces d’une même médaille. Il est l’aiguilleur des sens, permet la compréhension et l’acquisition de la réalité telle qu’elle s’offre à nous dans le mouvement de la vie. Le rire éloigne la mort, la fait disparaître, accouche de la communauté humaine par sa générosité, se propage comme une contagion en soufflant une science partagée avec tous, une conscience universelle. Charlie Chaplin fait rire toutes les communautés humaines.
Le rire est une soupape de sécurité, de décompression et de libération de la pression idéologique des systèmes dans lesquels nous sommes amenés à vivre.

         2. Le rire d’enfermement.
a. Les idéologies religieuses et autres furent créées pour asservir les peuples au profit de quelques particuliers. Toutes ont compris que le rire se confondait avec la vie et avait une puissance phénoménale ; il est le propre de la vie de l’homme quand celui-ci est contraint au joug : sans rire, pas de vie ; sans vie, pas d’hommes ; sans hommes, pas de pouvoir sur eux pour satisfaire les appétits des consciences privées.
Toutes les sociétés enfermèrent et continuent à enfermer le rire dans des enclos qu’elles contrôlent, de telle sorte que le rire ne puisse les menacer ni les mettre en danger en tant qu’entités. Elles créent et entretiennent le rire du vulgaire. Par cette ruse, le rire de nature devient le rire d’enfermement ; le rire est utilisé, détourné avec d’autant plus d’efficacité que le rieur croit saisir et comprendre une réalité dont il ne saisit que les apparences qui lui sont montrées.
Le rire au service du système :
La mécanique ou « le » mécanique, dont parle Henri Bergson dans son essai de 1900 Le rire, part de l’idée que la vie humaine se résume à la vie en société à un moment donné ; l’homme, au sein de cette société, se raidit dans son rôle. Il devient alors une mécanique bien réglée, automatisée qui à certains moments, inévitablement, se grippe ou apparaît au grand jour comme « du mécanique plaqué sur du vivant ». C’est alors que le rire intervient pour dénoncer, ou mettre en évidence cette sclérose, cette rigidification de l’humain transformé en mécanique. Selon Bergson, le rire est utile pour « assouplir » l’homme et lui faire accomplir la tâche qui lui est dévolue. En ce sens, le bizutage est un exemple intéressant : Bergson fait une analyse sociale de ce système d’intégration des nouveaux membres d’une grande école ou d’une université. En se moquant des nouveaux venus, les « anciens » se moquent du petit étudiant qu’était chacun d’entre eux avant le concours. Chacun, en tournant en dérision son propre passé, s’intègre au nouveau groupe qui, du coup, se sent supérieur dans la société. Le rire est donc un facteur d’intégration et d’asservissement des nouveaux venus au sein d’une caste.

b.                            Dans Au Nom de la Rose d’Umberto Eco, frère Georges l’Ibérique, serviteur de Dieu à ses heures perdues, est voleur à Sibos prés de Burgos, voleur du deuxième livre de la Poétique d’Aristote et des plus beaux manuscrits des Apocalypses de Léon et de Castille. Larcin qui lui permit de devenir célèbre et estimé dans l’abbaye en lui faisant gravir les échelons et obtenir le poste de bibliothécaire destiné à un frère de 10 ans son aîné. Il put de même faire élire abbé un moine qui était sous son influence. 40 ans durant, il fut le maître de cette communauté. L’arrogance et le mépris qu’il éprouvait pour les hommes le poussèrent à tuer ses condisciples, enfermé dans la folie du désir de conserver et de posséder par-delà sa mort le deuxième livre d’Aristote car nul homme n’était digne d’hériter de son secret. Les derniers instants de sa vie furent consacrés à déchirer en lambeaux les feuilles du livre en les mangeant avec gloutonnerie. Or, ce livre avait été empoisonné par ses soins pour assassiner toute personne qui le lirait. En avalant sa proie qu’il avait soustraite à frère Guillaume, au milieu de l’autodafé qu’il avait allumé volontairement, le rire s’échappa du fond de sa gorge, le libérant de son enveloppe charnelle. Il se présentait comme le serviteur et l’instrument de Dieu mais hélas, il se prit pour Dieu lui-même !      

Au Nom de la Rose, extrait, p. 480 : Georges parle à Guillaume.

«  Mais combien d’esprits corrompus comme le tien tireraient de ce livre l’extrême syllogisme, selon quoi le rire est le but de l’homme ! Le rire distrait, quelques instants, le vilain de la peur. Mais la loi s’impose à travers la peur, dont le vrai nom est crainte de Dieu. Et de ce livre pourrait partir l’étincelle luciférienne qui allumerait dans le monde entier un nouvel incendie : et on désignerait le rire comme l’art nouveau, inconnu même de Prométhée, qui anéantit la peur. Au moment où il rit, peu importe au vilain de mourir ; mais après, quand prend fin la licence, la liturgie lui impose de nouveau, suivant le dessein divin, la peur de la mort. Et de ce livre pourrait naître la nouvelle et destructive aspiration à détruire la mort à travers l’affranchissement de la peur. »
Blog du café philo  http://philopistes.blogspot.fr/  

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                                      Pourquoi célébrer 1914 ?

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