dimanche 11 février 2024

Sujet du Merc. 14 Fev. 2024 : Tu vivras comme un dieu parmi les hommes ....

 

Alors que la vie humaine gisait à nos yeux honteusement écrasée sous le poids de la religion, qui sortait sa tête des régions du ciel, accablant les mortels de son horrible aspect, le premier, un homme un Grec, osa lever au ciel des yeux mortels et le premier, il osa résister. Ni les fables relatives aux dieux, ni la foudre, ni le ciel avec ses grondements menaçants ne l'ont abattu. Au contraire ces éléments ont rendu si ardent le courage de son âme que le premier, il désirait briser les verrous serrés des portes de la nature. Ainsi la vigueur vive de son âme vainquit et s'avança bien au-delà des murailles enflammées du monde. Il a parcouru par son intelligence, et son courage l'immensité du Tout, d'où, victorieux, il nous a rapporté ce qui pouvait naître, ce qui ne le pouvait pas, et selon quel système une puissance limitée était accordée aux choses, ainsi que une fin profondément enracinée. C'est pourquoi la religion, terrassée à terre, est à son tour écrasée, sa victoire nous égale au ciel  - 

Lucrèce, De rerum natura, livre I, vers 62 au 79 Eloge d’Epicure

                  Tu vivras comme un dieu parmi les hommes .... 

Philosopher :
« Même jeune, on ne doit pas hésiter à philosopher. Ni, même au seuil de la vieillesse, se fatiguer de l'exercice philosophique. … Tel., qui dit que l'heure de philosopher n'est pas venue ou qu'elle est déjà passée, ressemble à qui dirait que, pour le bonheur, l'heure n'est pas venue ou qu'elle n'est plus.

Sont donc appelés à philosopher le jeune comme le vieux. Le second pour que, vieillissant, il reste jeune en biens par esprit de gratitude à l'égard du passé. Le premier pour que jeune, il soit aussi un ancien par son sang-froid à l'égard de l'avenir. »

 

Les dieux :    
«  D'abord, tenant le dieu pour un vivant immortel et bienheureux, selon la notion du dieu communément pressentie, ne lui attribue rien d'étranger à son immortalité ni rien d'incompatible avec sa béatitude… Car les dieux existent : évidente est la connaissance que nous avons d'eux. Mais tels que la foule les imagine communément, ils n'existent pas : les gens ne prennent pas garde à la cohérence de ce qu'ils imaginent.

N'est pas impie qui refuse les dieux populaires, mais qui sur les dieux, projette les superstitions populaires. »

 

La mort :      
« Accoutumes toi sur ce point à penser que pour nous la mort n'est rien, puisque tout bien et tout mal résident dans la sensation, et que la mort est l'éradication de nos sensations. Dès lors, la juste prise de conscience que la mort ne nous est rien autorise à jouir du caractère mortel de la vie : non pas en lui conférant une durée infinie, niais en l'amputant du désir d'immortalité…
Stupide est donc celui qui dit avoir peur de la mort non parce qu'il souffrira en mourant, mais parce qu'il souffre à l'idée qu'elle approche.    
Quand nous sommes, la mort n’est pas là, et quand la mort est là, c'est nous qui ne sommes pas. Elle ne concerne donc ni les vivants ni les trépassés, étant donné, que pour les uns, elle n'est point, et que les autres ne sont plus. »     

Vivre :
« Celui qui incite d'un côté le jeune à bien vivre, de l'autre le vieillard à bien mourir est un niais, non tant parce que la vie a de l'agrément, mais surtout parce que bien vivre et bien mourir constituent un seul et même exercice. 
S'il est persuadé de ce qu'il dit, que ne quitte-t-il la vie sur le champ Il en a l'immédiate possibilité, pour peu, qu'il le veuille vraiment. S'il veut seulement jouer les provocateurs, sa désinvolture en la matière est déplacée.
Souvenons-nous d'ailleurs que l'avenir, ni ne nous appartient, ni ne nous échappe absolument, afin de ne pas tout à fait l'attendre comme devant exister, et de n'en point désespérer comme devant certainement ne pas exister. »

 

Les désirs :   
Certains d'entre les désirs sont naturels, d'autres vains, et si certains des désirs naturels sont contraignants, d'autres ne sont... que naturels. Parmi les désirs contraignants, certains sont nécessaires an bonheur, d'autres à la tranquillité durable du corps, d'autres à la vie même.  
Or, une réflexion irréprochable à ce propos sait rapporter tout choix et rejet à la santé du corps et à la sérénité de l'esprit (intellect).         
C'est sous son influence que nous faisons toute chose, dans la perspective d'éviter la souffrance et l'angoisse. 

 

Le plaisir :

« Quand nous parlons du plaisir comme d'un but essentiel, nous ne parlons pas des plaisirs du noceur irrécupérable ou de celui qui a la jouissance pour résidence permanente comme se l'imaginent certaines personnes peu au courant et réticentes, ou victimes d'une fausse interprétation, mais d'en arriver au stade où l'on ne souffre pas du corps et où l'on n'est pas perturbé intellectuellement.

C'est lui (le plaisir) que nous avons reconnu comme bien premier, né avec la vie. C'est de lui que nous recevons le signal de tout choix et rejet. C'est à lui que nous aboutissons comme règle, en jugeant tout bien d'après son impact sur notre perception du monde.           
Ainsi tout plaisir, par nature, a le bien pour intime parent, sans pour autant devoir être cueilli. Symétriquement, toute espèce de douleur est un mal, sans que toutes les douleurs soient à fuir obligatoirement. C'est à travers la confrontation et l'analyse des avantages et désavantages qu'il convient de se décider à ce propos. »       

La prudence (Phronésis) :  
La prudence, d'où sont issues toutes les autres vertus ( au sens latin de Virtu) , se révèle en définitive plus précieuse que la philosophie : elle nous enseigne qu'on ne saurait vivre agréablement sans prudence, sans honnêteté et sans justice, ni avec ces trois vertus  vivre sans plaisir.
Les vertus en effet participent de la même nature que vivre avec plaisir, et vivre avec plaisir en est indissociable. »

Le bonheur :
« D'après toi, quel homme surpasse en force celui qui sur les dieux nourrit des convictions conformes à leurs lois ? Qui face à la mort est désormais sans crainte ? Qui a percé à jour le but de la nature, en discernant à la fois comme il est aisé d'obtenir et d'atteindre le summum des biens, et comme celui des maux est bref en durée ou en intensité ?      
Souscrire au mythe concernant les dieux ? Cette première option laisse entrevoir un espoir, par des prières, de fléchir les dieux en les honorant.
S'asservir aux lois du destin des physiciens naturalistes ? C’est alors afficher une nécessité inflexible. »

Tu vivras, comme un dieu parmi les humains :  
« Qui témoigne, disais-je, de plus de force que l'homme qui ne prend le hasard ni pour un dieu, comme le fait la masse des gens ni pour une cause fluctuante ; l'homme convaincu qu'il est meilleur d'être dépourvu de chance particulière tout en raisonnant bien que d'être chanceux en déraisonnant.

À ces questions, et à toutes celles qui s'y rattachent, réfléchis jour et nuit pour toi-même et pour qui est semblable à toi, et veillant ou rêvant jamais rien ne viendra te troubler gravement : ainsi vivras-tu, comme un dieu parmi les humains. Car il n'a rien de commun avec un vivant mortel, l'homme vivant parmi des biens immortels. »           

                      (Larges extraits de la « Lettre à Ménécée »  -  Epicure -   EPICURE -341 -270 )

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