lundi 11 avril 2016

Sujet du Merc. 13 Avril 2017 : LA DEFENSE DE SOCRATE



LA DÉFENSE DE SOCRATE

La  biographie de Socrate

Socrate est l’un des philosophes grecs qui ont changé le cours de la philosophie occidentale. Né autour de 469 av. J-C d’un père sculpteur et d’une mère sage-femme, Socrate se dédia à l’enseignement de la philosophie dans les rue d’Athènes. Il eut plusieurs élèves mais il ne créa pas d’écoles philosophiques. Socrate se désintéressait de son apparence physique et sa laideur et son absence de soin dans ses choix vestimentaires allaient contre la mentalité grecque qui notamment voyait dans le corps une sorte de miroir de l’âme. Cela dit Socrate se révélera être un homme courageux et un exemple de vertu. Cela en deux occasions. La première fut  en 432 av. J.-C., année durant laquelle Socrate participa à la guerre du Péloponnèse, durant laquelle  Sparte était opposé à la cité de Socrate, Athènes. Durant cette guerre, Socrate sauva la vie à Alcibiade. La deuxième occasion où Socrate montra son courage, fut notamment durant son fameux procès, qui lui coûta une condamnation à mort.

Socrate n’a rien laissé d’écrit. Ce que nous savons de sa pensée nous a été transmis par Platon, Xénophon et Aristophane. Le meilleur témoignage du fameux procès à Socrate demeure l’ouvrage de Platon intitulé « L’apologie de Socrate ».  Cet ouvrage est une véritable apologie de la dialectique et du droit à la défense.

Le contexte historique  du procès et les chefs d’accusations 

Le contexte dans lequel se déroula le procès à Socrate été très particulier. C’est un contexte de crise.  Athènes avait perdu la guerre du Péloponnèse, les penseurs tels que Socrate étaient montrés du doigt par les peuples comme responsable de cette défaite.

Nous pouvons résumer les accusations portées à l’égard de Socrate dans les chefs d’accusation suivants :

a)Délit d’impiété : Ce délit était prévu par un décret qui remonte à l’époque de Périclès[1]. Ce décret prévoyait une condamnation pour ceux qui ne croient pas à la divinité et qui enseignaient des doctrines qui se fondaient sur les entités céleste (Plutarque, Périclès 32.1.)

b) Corruption de la jeunesse : Mélétos, son principal accusateur, affirmait en bon  démagogue en  s’adressant aux  juges et au jury du procès que ces derniers étaient tous de  bons  pédagogues et de bons exemples pour la jeunesse, tous à  l’exception de Socrate. Ce dernier était accusé de gâcher, à travers ses enseignements  les bons enseignements soi-disant traditionnels qui étaient donnés au jeunes Athéniens. 

c) Avoir introduit à Athènes des nouvelles divinités tel que  le démon de Socrate.


L’Apologie de Socrate

L’œuvre de Platon intitulée  « l’Apologie de Socrate » est un témoignage unique du procès de Socrate, auquel Platon participa en temps qu’auditeur. Platon rapporte et interprète à sa façon  la plaidoirie que Socrate a utilisée afin de contredire les accusations qui lui étaient portée. Dans la première partie de la plaidoirie Socrate  se défend et cherche à mettre son principal accusateur Mélétos devant ses propres contradictions. Dans  la deuxième partie,  le ton change. Socrate s’en prend aux juges qui l’accusent avec un ton menaçant et refuse la peine de l’exil en acceptant ainsi la peine de mort.
Socrate n’est pas un orateur comme les autres. Pernot de sa part décrit l’Apologie de Socrate comme un « […] modèle de plaidoyer conforme aux exigences philosophiques [2][…] ». La défense de Socrate vise à travers la dialectique du procès et le questionnement de ses adversaires visant à le mettre devant leurs contradictions. Socrate cherchait dans un premier temps à convaincre les juges par le biais d’arguments solides et non à captiver leur bienveillance. En plus en interrogeant les parties adverses, Socrate cherchait à les éduquer selon la notoire technique de la maïeutique.

 Par le biais de la figure quasi-mythique de Socrate, Platon veut creuser un fossé entre la philosophie socratique et la sophistique. Dans d’autres dialogues tels que le "Gorgias ", Platon oppose la philosophie de Socrate fondée sur des arguments solides et sur le principe de non-contradiction  à  la rhétorique des sophistes. Ainsi Socrate définit la rhétorique des sophistes dans les termes suivants : « La rhétorique […], j’en fais une partie de la flatterie, comme l’esthétique, bien sur la sophistique » (Gorg. 463 b,). Dans l’exorde de l’Apologie de Socrate, Platon fait prononcer à son maitre la frase suivante :
« […] je suis orateur, mais non à leur manière. Quoi qu’il en soit, je vous répète qu’ils n’ont rien dit ou presque rien qui soit vrai. Moi, au contraire, je vous dirai l’exacte vérité […] ce ne sont pas des discours parés de locutions et de termes choisis et savamment ordonnés que vous allez entendre, mais des discours sans art, fait de premier mots venus[…]» ( Apologie, I,1,)

Ainsi Socrate prend ses distances du monde des sophistes et oppose un discours visant simplement à persuader par une plaidoirie  qui vise à convaincre. Par la suite Socrate prend aussi ses distances du monde des tribunaux en affirmant : « […]je suis vraiment étranger au langage qu’on parle ici » (Apologie I, I,). Socrate ainsi veut  incarner une nouvelle figure d’orateur philosophe qui à ses dires veut dire la vérité) (Apologie I, I,). Dire la vérité ainsi que la faire ressurgir par le biais de la dialectique ainsi que de la maïeutique devient une exigence quasi éthique pour Socrate. Ce dernier prend ses distance de  ceux qui afin d’échapper à une punition essayaient de séduire les juges. Socrate est conscient du risque qu’il court, mais il ne manque pas de souligner que son défi a la mort n’est pas une « bravade ». C’est un risque que Socrate veut prendre au nom de la vérité.

La mort de Socrate représente un cas extrême de cohérence philosophique, c’est le sacrifice d’un philosophe qui par le biais de son exemple se veut « d’éclairer et de convaincre » un juge de la vérité. (Apologie XXIV), Cela dit, le juge qui en toute conscience condamne un innocent sera selon Socrate condamné par Zeus à un châtiment plus pénible que celui qui a été infligé à Socrate (Apologie XXX).

 L’idée de justice est  ainsi liée à l’idée de vérité. Contrairement au sophiste Socrate est très loin de faire coïncider la justice avec la loi du plus fort. Platon dans le premier livre de la  République affronte cette question notamment dans le dialogue entre Socrate et Trismique. Ce dernier fait coïncider la notion de justice avec la notion de pouvoir. Selon Socrate la justice ne coïncide pas toujours avec la loi ou l’ordre établi.

En ce sens Platon répand une idée clé de culture grecque, qui remonte à l’Antigone de Sophocle, l’idée d’un droit et d’une justice qui dépassent la simple norme juridique. Dans l’Apologie de Socrate nous trouvons l’idée que la justice se dévoile à travers la dynamique du procès.


Conclusion

Le droit à un procès équitable tout comme le droit au contradictoire est une conquête de la civilisation. Dans l’Apologie de Socrate nous avons l’embryon du modèle de la moderne procédure accusatoire, qui se fonde sur le droit à être jugé par un juge tiers et impartial.

Ce modèle notamment encourage le rôle des parties et par cela encourage la dialectique et par conséquent le droit au contradictoire. Ce principe est ancré dans la culture classique. Nous en trouvons des traces dès l’Iliade d’Homère avec le fameux épisode du bouclier d’Achille (IliadeXVIII, 478,-607), suivi par l’Antigone de Sophocle et la Médée  d’Euripide. 
                


[1] Jean Rudhart, « La définition du délit d’impiété d’après la législation attique », in Revue suisse pour l’étude de l’antiquité classique, n. 17, 1960.
[2] Laurent Pernot, La Rhétorique dans l’antiquité, Paris, Livre de poche, Deuxième édition Livre de Poche,  2000,  p. 69.

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