lundi 31 août 2015

Sujet du Merc. 02/09 : Qu’est ce que la fin ?



                                                  
 
Qu’est ce que la fin ? 
   

                       Il semblerait que la fin, aussi inquiétante et intrigante qu'elle puisse paraître, ne s'en tienne pas à un seul type, identique pour chaque situation possible et imaginable.

Pour commencer, le dictionnaire attribue déjà trois définitions à ce mot: «point dans le temps, parfois dans l'espace, à partir duquel une chose n'est plus; terme, achèvement», mais également «terme de la vie, mort» ainsi que «but vers lequel on tend». Ceci sous-entend donc que la fin ne se subit pas dans toutes les situations et peut, au contraire de vouloir être évitée par de nombreux moyens, suciter un objectif, une cible. En philosophie, cette vision est équivalente à ce qu'on appelle la «Fin Dernière».    
Que ce soit un but, une fatalité ou bien une fonction, qu'on s'en réjouisse ou qu'on la subisse, la fin est rendue certaine par le mot-même, qu'on relie au concept, ainsi que par les questions qui persistent à travers le temps.   
Toujours dans une approche philosophique, le principe de Finalité revient souvent. «La nature ne fait rien en vain». Cette célèbre formule d'Aristote exprime cette idée que tout être à une fin, un but. Rien dans la nature ne serait gratuit, manqué ou superflu. C'est d'ailleurs cette logique qui fait dire à Aristote que c'est parce que l'homme est intelligent qu'il a des mains: chez tout autre animal privé de raison cet organe serait inutile.

Ce point de vue-là rappelle évidement une autre célèbre expression, «la fin justifie les moyens», et nous pousse alors à nous demander, autant pour l'Homme que parfois, pour notre propre personne, jusqu'où l'individu peut placer sa propre limite afin d'obtenir ce qu'il souhaite et parallèlement, où se place sa réticence, son scrupule dans une telle situation -aussi propre à chacun soit-elle.
    

La fin, celle de l'arrêt, du terme, peut être pensée à plusieurs échelles. Avec un grand «F», la Fin évoquerait plutôt l'idée d'apocalypse, de terme fatal pour tout le monde. La Science veut qu'un beau jour, on ne sait précisément quand, la Terre explose. La Fin serait donc d'abord et surtout celle de notre planète, mais aussi la notre dans la mesure où Terre mère nous porte tous. Cette fin-là est peut-être bien le summum de la fatalité, puisque cela signifierait qu'il ne resterait plus rien, plus rien de rien, plus aucun homme pour  expérimenter, communiquer, partager, plus aucun homme pour s'imposer, plus aucun homme pour témoigner de l'évidence et de l'exactitude du cycle. Mais qui sait, d'ici là, la vie se sera peut-être développé ailleurs et, tant qu'aucun homme ne prédira une quelconque fin de l'Univers entier ainsi que de cette fameuse immensité qui nous dépasse encore, la Fin continuera de se tenir loin. On peut même en venir à remettre en question, à un tel niveau, ce qui semble pourtant évident. Il y a-t-il réellement une fin? L'évolution s'achèvera-t-elle donc? La limite, qui fascine telle un mythe et sucite une crainte presque agréable, excitante, sera-t-elle un jour une vérité? Toujours dans le questionnement, il est possible de se demander si la Fin est bien définitive ou si quelque part, on ne sait comment, il n'y a pas de recommencement systématique. La Fin, avec un grand «F», celle du terme définitif, existe-t-elle ? 
La fin, c'est aussi celle de chacun. Et cette fin-là, elle est concrète, certaine, vue et revue, de près  ou de loin. Chaque personne est part du grand cycle, maillon de la grande chaîne de l'Humanité, et chaque maillon a son propre cycle, plus court, finalement infime en comparaison à l'Univers. Sur l'échelle de l'immensité, une seule et unique vie, est comme une étincelle: moment de gloire très bref. Mais cette vie, un peu ratée pour certains, tient au moins l'honneur d'être un des sept milliards de maillons qui font l'Humanité   
       
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Mais comment l'individu aborde-t-il sa propre fin, rendue fatale par la promesse qu'elle constitue? «[...] que Philosopher, c'est apprendre à mourir» a dit Cicéron. Ainsi, puisque la mort est la seule véritable promesse, il nous incite a se nourrir, s'enivrer des questionnements, se perdre dans les réflexions et creuser, afin de ne plus se faire autant de soucis pour ce qui est si véridique, si sûr: la fin. C'est vrai, les hommes ont cette obsession, cette soif d'étudier la mort, d'essayer de cerner ce qu'ils n'ont pas encore vécu. Beaucoup de «pourquoi?», de définitions encore insatisfaisantes à propos de la mort. Et persiste pour nous cet espoir d'une continuité, même après notre fin, et ceci que l'on soit croyant ou non. Il est bon de se dire que la lumière ne s'éteint pas, que la machine fonctionne toujours, qu'il y aura un relai. Oui, au fond, le concept de fin, de mort est une chose que l'on aurait tendance à fuir, même si la réflexion ne veut cesser, comme en témoignent notamment le mouvement baroque et de nombreux artistes. Pierre de Ronsard, par exemple, pensait que sa condition de poète le ferait en quelque sorte immortel dans les mémoires, et donc que sa célébrité le rendrait éternel et glorieux (cf. Sonnets pour Hélène)   
L'individu recherche des moyens de retarder cette fatalité. On nous dit de ne pas fumer, ne pas trop boire, avoir une bonne alimentation etc, mais en opposition, nous recherchons peut-être des plaisirs pour oublier cette mort qui nous attend au bout: amour, ivresse, rires, passion, abondance dans la vie et désir de tout faire, de tout vivre et de tout ressentir, quand bien même cela est impossible. Mais la fin exclue-t-elle ce bonheur un peu idéal? Reste-t-elle une fatalité si l'homme est réellement comblé? D'ailleurs, peut-on mourir comblé

Il me semble également important de penser à ce qu'est la mort. J'entends par la: meurt-on brièvement, lorsque l'on est vraiment plus, lorsque la conscience (l'esprit?) s'éteint? Ne commence-t-on pas à mourir si l'on en vient à se sentir seul, à observer notre propre motricité diminuer lentement?   
       

                                               Autres pistes pour une discussion sur la fin:  
     

Lorsqu'un moment, une situation dans laquelle on se trouvait et qu'on appréciait tellement touche à sa fin. Déception, colère, frustration. Retour à la réalité qui a un goût amer. On se plaisait tant dans ce moment-là que la fin apparaît violente. Ce qui est fatal, c'est de se dire que, bien que le bonheur se manifestera sans doute de nouveau plus tard encore, ce qui a été vécu et ressenti précisément lors de cet instant se perd pour toujours. Il est possible de se demander, donc, comment peut-on savoir lorsqu'on vit l'instant suprême de bonheur? La fin tient cet aspect net, radical. Ce qui fut ne sera plus. Et si les sentiments et les sensations se matérialisent, ce n'est que semblant à ce moment unique, parfois insolite et égaré, auquel on se raccroche, moment pourtant désormais abstrait pour nous. Là, la fin, c'est savoir que ce bonheur-là de maintenant va se dissiper.

Fin comme fin d'un idéal, d'une certaine époque, d'une ère ( peut être quelque chose propre à chacun, à l'échelle d'une vie, ou bien période historique vécue par toute une génération, de près ou de loin selon les personnes. les deux supposent une forme de nostalgie par la suite. Fin d'un temps, de mœurs, d'une mode et d'un fonctionnement général qui ne sera plus jamais le même. Evoque quelque chose d'unique, qui ne se reproduira pas.

La fin de l'Humanité, perçue autrement (cf. Combat, articles de Camus entre autres). Lorsque le progrès engendré par l'Homme va trop loin et se retourne contre lui. Certaines personnes regardent le monde aujourd'hui et se demandent s'il ne court pas déjà à sa perte. Donc l'évolution continue mais, si elle ne met pas fin à la planète, elle met fin à l'Homme et à beaucoup de valeurs, de richesses. Extrait du «Siècle de la Peur», Camus, Combat, 1948: «Entre la peur très générale d'une guerre, que tout le monde prépare et la peur toute particulière des idéologies meurtrières, il est donc bien vrai que nous vivons dans la terreur. 
Nous vivons dans la terreur parce que la persuasion n'est plus possible, parce que l'homme a été livré tout entier à l'histoire et qu'il ne peut plus se tourner vers cette part de lui-même, aussi vraie que la part historique, et qu'il retrouve devant la beauté du monde et des visages; parce que nous vivons dans le monde de l'abstraction, celui des bureaux et des machines, des idées absolues et du messianisme sans nuances. Nous étouffons parmi les gens qui croient avoir absolument raison, que ce soit dans leurs machines ou dans leurs idées. Et pour tous ceux qui ne peuvent vivre que dans le dialogue et dans l'amitié des hommes, ce silence est la fin du monde.»
Mais la fin peut être synonyme de positif, un soulagement, la fin marque ainsi un renouveau. Là, encore une fois, cette perception s'applique à des situations personnelles ou à des faits historiques (chute du mur de Berlin par exemple, qui fut célébrée dans l'euphorie. 

La fin d'un calvaire, d'une situation mauvaise pour une majorité dans le cas historique, ou mauvaise pour l'homme concerné si c'est l'histoire d'une vie.

 

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